Musique

Spécialement Noël

Viviana von Allmen

Dimanche à l’église du Pasquart à Bienne, et dans la plus ancienne tradition européenne de la musique, c’est célébré le somptueux concert de Noël. La Société d’orchestre de Bienne a présenté un programme de musique de chambre baroque.
Le récital débute par l’œuvre de Dietrich Buxtehude, «la troisième Sonate à due op 1», qui au tempo d’adagio situe le public dans un décor de la renaissance. Puis au mouvement d’allegro la mélodie remémore les anciennes cours et leurs danses, mais c’est le clavecin, joué en toute pureté par Kathrin Nünlist, qui marque les mouvements de la Sonate. Suit  «Le virtuose agréable» de Johan Matthenson, où Beda Mast et sa virtuosité d’ interprétation de la flûte, nous transporte dès le début dans les paisibles prairies du dix-huitième siècle, pour finaliser sur le tempo de Gavotta au rythme de joie. La troisième œuvre extraite de «Quadri» de George Philipp Telemann réunit tous les musiciens. Le public est particulièrement sensible au jeu de réponse auquel se livrent les instruments, tantôt le violon et la flûte puis le violoncelle et le violon dans une complicité charmeuse. Dès que l’orchestre entame les premières notes de la Sonate en sol mineur de Jean Sébastien Bach les têtes du public bougent en cherchant l’instrument original (la viole de gambe) au centre de l’autel. Peine perdue, cet instrument du XVe siècle est avantageusement remplacé par le jeu subtile du violoncelle et de la basse. Cette mélodie divine charme ses auditeurs. Le concert s’est achevé par une magistrale exécution du Sixième Quatuor pour cordes de 1738 de George Philipp Telemann composé lors du séjour de l’auteur à Paris. Tous les acteurs musicaux sont là pour nous enchanter par cette ligne mélodique d’une incroyable pureté. Dans le mouvement Distrait la flûte et le violon sont en parfaite harmonie, l’un seconde l’autre  pour finir à l’unisson. En opposition au tempo Modéré où le premier instrument exécute sa partition en piano, le deuxième lui répond comme un écho en forte, semblant lui raconter une histoire pour l’amener à jouer de connivence. Les applaudissements chaleureux qui ont accueilli ce concert sont réjouissants. L’église du Pasquart décorée d’une exposition de dessins d’enfants sur le thème de Noël offrait ainsi un cadre empreint de rêveries pour ce merveilleux concert de la SOB.

Voyage

Le grand Sud

En quittant Buenos Aires, dans la nuit du 3 mai, je retrouve l’excitation du voyage, une très grande fébrilité, exacerbée par la nouvelle étape de mon voyage : Ushuaia, la ville la plus australe et de surcroît capitale de la «Terre de Feu ». Un temps exécrable m’attend, la pluie, le froid, aucun repère à disposition pour trouver une auberge. Il me faudra attendre le lendemain matin pour essayer de découvrir cette ville, construite sur la précordillère des Andes, pour accueillir les familles des bagnards. En effet, tout comme les français en Guyanne, on a construit ici une prison, au bout du monde, rejetant ainsi les parias de la société dans une région bien inhospitalière. Comme on n’est pas bagnard de père en fils, la société s’est développée notamment grâce à l’école navale militaire et plus tard l’industrie d’appareils électroménagers –hors taxe-, la pêche. Aujourd’hui le tourisme prend gentiment l’ascendant sur les autres activités. Cette nouvelle industrie n’est pas trop institutionnalisée, donc chacun offre des tours en bateau. C’est rigolo, tu vas au port et tu négocies ton excursion.

En me promenant dans la ville construite toute en pente, je découvre les maisons (des cabanes en brique) très colorées rompant avec la monotonie d’un paysage austère. Ici les gent ne payent pas le terrain et peuvent construire où ils veulent.
Dans l’auberge j’ai fait la connaissance d’un argentin du nord qui cherchait du travail. Après avoir sympathisé, il m’invite à le visiter dans sa province Santiago de Estero. Après cinq jour je reprends le bus et 2000 km plus au Nord, je trouve une fille grecque puis un hollandais qui parlent aussi mal l’espagnol que moi. En arrivant à Rio Grande je me suis rendu compte que j’avais loupé le bon bus, mais la contrôleuse du coin se souvient qu’hier une personne manquait à l’appel et voyant mon désarroi, elle fait tout pour que je puisse continuer ma route. Quelle route, 13h de bus sur des pistes en terre battue, passage par une enclave chilienne et traversée en bateau par le détroit de Magallanes. Une première étape avait été prévue à Calafate toutefois le peu d’intérêt que présente cette ville me décide à poursuivre immédiatement le périple qui doit me conduire au mythique glacier Perito Moreno. Le chemin traverse une région plutôt désertique seuls les troupeaux de moutons offrent de la vie au milieu des pipelines et plantes desséchées. Si ce n’est la grandeur majestueuse du paysage, le tableau est un peu désolant. Mais le spectacle grandiose qui m’attendait en valait la peine. À l’approche du glacier notre chauffeur de bus prend des chemins inhabituels, ce qui me permet de commencer un vrai reportage photographique. Une fois encore, les distances me jouent des tours, car depuis la première photo du glacier jusqu’à mon arrivée à ses pieds, il faudra bien plus que deux heures de route. Toutefois rien ne me fait regretter une quelconque photo, chacune montrant le glacier dans un paysage différent. De plus, de tout petit et pouvant être mis entièrement sur une photo, le Perito Moreno devient de plus en plus imposant pour devenir écrasant, monstrueux,  gigantesque à me couper le souffle. C’est en fait un glacier d’eau douce situé, dans le parc national des glaciers au pied de la précordillère. L’on me dit que c’est la plus grande réserve d’eau douce du monde. De plus c’est le seul glacier qui croît encore, soit 4 centimètres par an. Chaque cinq ans le Perito Moreno offre un spectacle énorme lorsqu’il rejette dans l’eau du lac des parois entières de ses entrailles. Des blocs d’une hauteur de 50 mètres s’écrasent alors dans un bruit de tonnerre, formant des vagues ressemblant à un véritable raz de marée. Mais ce n’est pas pour aujourd’hui…La chance est tout de même au rendez-vous, j’assiste incrédule à la chute d’une paroi mineure du glacier, accompagnée d’un vacarme qui me fait battre le cœur plus vite. Une pensée me traverse l’esprit : même si le voyage devait s’arrêter là, je serais comblé. Mais ça continue. Mon itinéraire me porte d’ouest en est vers la côte atlantique, plus précisément à Puerto Madryn. C’est ici, pendant la saison froide, que les baleines et autres grands cétacés viennent frayer et se reproduire dans les eaux plus tempérées de la baie. Le tour en bateau de la péninsule de Valdez permet d’approcher, à moins de vingt mètres, ces monstres marins. Quel spectacle ! Sur la côte les éléphants et lions de mer se prélassent sur les magnifiques plages désertées, en cette période, par les touristes. Après l’océan, les montagnes sur le flanc desquelles je découvre à Esquel le plus ancien des chemins de fer à vapeur du sud de l’Argentine, «La Trochita», à voie étroite. Cette relique a été remise en fonction spécialement pour les touristes qui doivent supporter le confort spartiate des bancs en bois et du chauffage par poêle de type Salamandre. Je me crois revenu au temps des pionniers.
Maintenant « La petite Suisse » : Bariloche, les chalets avec leurs petites croix blanches, les montagnes, la fondue, la région pleine de lacs, ceci ne m’a pas frappé sauf que les chalets sont tous neufs et brillants pour demeurer dans l’ambiance helvétique. Bon ce n’est pas ce qui m’attire le plus !
A suivre…

Viviana von AllmenGlacial Perito MorenoLa Trochita