Actualité

Liberté de la presse dans le monde, un triste bilan

20 ans de combat pour la liberté de la presse

A l’occasion de la 15e Journée internationale de la liberté de la presse, le mardi 3 mai prochain, Reporters Sans Frontières fêtera ses 20 ans. Le triste bilan de 2004, présentant de longues listes de journalistes agressés, emprisonnés ou tués, démontre que le combat de cette organisation est plus que jamais nécessaire.
Steve Remesch

C’est en 1985 qu’un journaliste de Radio France International, Robert Ménard, prend l’initiative de fonder une agence de presse alternative sous le sigle Reporters Sans Frontières. La vocation est de garantir un suivi aux conflits internationaux, surmédiatisés dans un premiers temps, tombés dans l’oubli dans un deuxième. Rapidement RSF se rend compte que la couverture de conflits et la  dénonciation de l’injustice ne vont pas sans révéler les soucis inhérents au métier d’informer. La défense de la liberté de la presse devient rapidement le cheval de bataille des Reporters Sans Frontières.
Aujourd’hui RSF dispose d’un conseil d’administration composé de journalistes  et de membres de la société civile. Le secrétariat international compte 33 personnes et peut compter sur un travail de veille de 150 correspondants. Aux 9 sections nationales (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, France, Grande-Bretagne, Italie, Suède et Suisse) s’ajoutent des représentations à Abidjan, Bangkok, Istanbul, Montréal, Moscou, New York, Tokyo et Washington. A coté de son rôle de gardien de la liberté d’informer, RSF essaye d’assurer un soutien aux familles des journalistes agressés, pris en otage, emprisonnés, tués « pour avoir voulu nous informer ». RSF alloue des bourses d’assistance aux familles démunies, finance les frais d’avocat lors de procès de presse, accueille des journalistes contraints de fuir leur pays et prête des gilets pare-balles identifiés « PRESS » aux journalistes indépendants se rendant en zone de conflit. Le financement n’est guère assuré par la contribution des membres. RSF compte surtout sur le sponsoring, des subventions, des parrainages et sur la vente de l’annuel album de photos « Pour la liberté de la presse » qui peut rapporter jusqu’à 80’000 francs par année.
Dans les 4 premiers mois de 2005 Reporters Sans Frontières déplore déjà 11 journalistes tués,  102 journalistes et 75 cyberdissidents emprisonnés. En 2004, 53 journalistes ont été tués en exercice de leur profession. Le nombre de morts n’avait pas été aussi élevé depuis 1995. L’Irak reste le pays le plus dangereux du monde pour les reporters: 19 d’entre eux y ont trouvé la mort en 2004 et plus d’une quinzaine ont été enlevés. En Asie, 16 reporters sont tombés la même année. 907 journalistes ont été interpellés, plus de 1 146 agressés ou menacés et 622 médias censurés. Près du tiers de la population mondiale vit dans un pays où il n’existe aucune liberté de la presse. La Chine reste la plus grande prison du monde pour les journalistes avec 26 détenus. A Cuba, plus de deux ans après le « printemps noir » de mars 2003, 22 professionnels des médias attendent toujours leur libération.
C’est dans ce contexte très particulier que Reporters Sans Frontières célèbra son 20e anniversaire lors de la Journée internationale de la liberté de la presse. A cette occasion RSF présentera l’édition 2005 de son annuel album photo. Cette année, ce sera le travail de Jeanloup Sieff qui est présenté. D’origine Polonaise, né le 30 novembre 1933 à Paris, il est l’un des plus grands photographes de ces dernières années, disparu en 2000. Exposé dans les plus grandes villes du monde, il a écrit les textes qui accompagnent ses photos, et réalisé des campagnes et des films publicitaires. Préfacé par Michel Tournier, vendu à 12 francs, ce magazine, qui regroupe 80 pages de photographies, va permettre à l’organisation de mener ses actions au jour le jour.

Édito

Les journalistes s’abonnent à la précarité

Viviana von Allmen
En Suisse, pays par excellence de la haute finance, dont la presse se fait un écho permanant, on en parle peu ou prou des difficultés des journalistes qui vivent l’autre face de la monnaie. 
Il est vrai que l’âge d’or du journalisme n’a jamais existé. Dès son émergence comme art d’informer, le journalisme a toujours été soumis aux aléas de ses rapports au pouvoir et à la politique, comme de ses liens avec les milieux économiques et financiers, aux contingences de l’audience et de la concurrence, aux incertitudes de l’actualité et de ceux qui produisent les journaux.
Intermittents, chômeurs, fragilisés en tous genres sont en général de « bons clients » pour les médias. Ces derniers sont en revanche beaucoup moins diserts lorsqu’il s’agit de parler de leurs ouailles : les journalistes. Tous ne sont pas des hommes troncs présentant le 20 heures pour un salaire annuel à 6 chiffres.
La FSJ estime ainsi que près de 10% des journalistes suisses sont au chômage. Cette activité est donc l’une des plus sinistrées de l’économie suisse, qui connaît actuellement un taux de chômage global de plus de 3 %. 
Dans les médias le régime minceur est, lui, toujours à l’ordre du jour. Selon la FSJ, quelque 600 journalistes sont actuellement inscrits au chômage. Il faut également ajouter les journalistes qui ont changé de profession et les indépendants en difficulté.
La nouvelle loi sur le chômage a essayé de pallier aux besoins particuliers des contrats de durée limitée en offrant des règles spéciales pour le calcul des 12 mois travaillés. Le fait d’accepter des engagements courts ne défavorise plus les assurés. Si, dans le cadre de deux ans, on peut justifier de six contrats d’une durée d’un mois, le droit à l’indemnisation est acquis ; en fait un emplâtre sur une jambe de bois.
Quel avenir pour la profession ? Les instituts de journalisme ne désemplissent pas, les restructurations économiques sont devenues une règle, la rentabilité des médias une véritable religion, comme dans beaucoup de domaines, que reste-t-il ? Probablement la foi et l’envie de partager avec les lecteurs. A vos plumes !