Jazz

China Moses : « Mes albums sont le fruit de mon envie, de ma passion et de ma détermination »

China Moses s’est confiée à Larticle.ch à l’issue de son concert à l’Auvernier Jazz Festival le 25 août dernier, durant lequel elle a joué le répertoire de son cinquième album qui sortira en octobre prochain.

Larticle.ch : Votre mère, Dee Dee Bridgewater, est chanteuse. Est-ce que la musique était donc une vocation pour vous ?

China Moses : Non pas du tout. Tous les enfants, je crois, ne veulent surtout pas faire le même métier que leurs parents. J’ai eu plein d’envies, que je n’ai pas réalisées. Je voulais être monteuse de bandes-annonces. Je voulais faire des études de relations internationales. Je voulais apprendre au moins 7 ou 8 langues et je voulais être rappeuse. C’est d’ailleurs ma plus grande frustration. Je ne rap pas : je n’ai aucun don pour le rap et pour l’improvisation des paroles.

L.ch : Quand vous êtes-vous donc lancée dans la musique ?

C.M.: Un jour, je faisais des maquettes et je chantais mes refrains. Ma mère les a fait écouter à une maison de disque et c’est comme ça que je me suis retrouvée chanteuse. La musique a toujours été une petite passion cachée. Ça n’a jamais été une vocation. Mais après, quand on a 15 ans et qu’on reçoit un contrat et qu’on y voit plein d’argent, on comprend et on se dit « au lieu d’aller à l’école, je peux faire ça et être payée ? Oh mais c’est chouette ! » (rires).

L.ch : Pensez-vous avoir été privilégiée ?

C.M.: J’ai eu une entrée facilitée dans la musique, oui. Après, ma carrière et les quatre albums, cinq en comptant celui qui va sortir, sont le fruit de mon envie, de ma passion et de ma détermination. C’est ça qui a fait que j’ai désormais la chance de jouer avec Raphaël et mes autres musiciens.

L.ch : C’est grâce à votre rencontre avec Raphaël Lemonnier qu’est né le spectacle Gardenias for Dinah et l’album qui s’en est suivi, pouvez-vous nous en dire plus sur cette rencontre ?

C. M.: On avait un ami en commun, on s’est rencontré et on s’est trouvé cet amour pour Dinah Washington. On a fait un an et demi de tournée avant d’enregistrer l’album, avant même de savoir qu’on allait faire un disque, on peut dire. C’est vraiment né d’une passion pour Dinah.

L.ch ; Après des débuts dans le R’n’b, votre dernier album This One’s For Dinah est très jazz, blues… Est-ce que c’est le style de musique dans lequel vous voulez rester pour la suite ?

C. M.: Je n’en sais absolument rien ! Le prochain album, Crazy Blues, est avec Raphaël, donc c’est blues et jazz mais je ne sais pas du tout où ça va m’amener. Moi je suis vraiment une chanteuse de Soul. J’adore chanter le jazz. J’adore raconter des histoires surtout. J’adore faire rire le public, je pense que ça doit être mon côté One Woman Show ou peut-être ma frustration de ne pas faire des comédies musicales. Je ne sais pas vraiment ce que c’est mais je n’ai pas une vocation d’être dans le jazz ou quoi que ce soit. Ma seule vocation c’est de chanter. J’aime chanter. C’est ça qui me rend heureuse, qui me fait garder mon sourire. Donc je ne sais pas du tout où est ce que je vais aller, après la tournée du prochain album. On verra bien ! J’aime avoir le choix !

L.ch : Pouvez-vous nous en dire plus sur votre prochain album qui sortira en octobre ?

C.M.: Il s’appelle Crazy Blues et on garde la même équipe. Mais ce sera un nouveau répertoire, celui qu’on a fait ce soir. C’est la suite de This One’s For Dinah. L’album part de Dinah Washington et explore les chanteuses qui l’ont influencée et celles qu’elle a influencées par la suite. C’est une autre excuse pour jouer les morceaux qu’on aime, simplement ! Je n’ai aucun mal à communiquer mon amour pour toutes ces chanteuses et essayer de faire sourire un public. C’est ce qui me plait.

L.ch : Avez-vous prévu de nouvelles collaborations ?

C. M.: J’ai des collaborations avec le saxophoniste Pierrick Pedron, le chanteur Hugh Coltman et le chanteur Syl Johnson qu’on a invité.

L.ch : Ce n’est pas la première fois que vous vous produisez en Suisse. Est-ce toujours un plaisir pour vous ?

C.M.: On aime bien jouer en Suisse. Mais on aime bien jouer partout où on est invité ! Chaque public, dans chaque ville, est différent. On ne s’en rend pas compte mais chaque ville, chaque festival, chaque salle de concert a une vibration… Souvent on nous demande comment on peut avoir du plaisir à jouer le même répertoire plus de 100 fois par année. Et bien, c’est les différentes énergies des différents publics qui nous donnent du plaisir. On reçoit une énergie différente à chaque fois et donc ce qu’on renvoit n’est jamais pareil. A Neuchâtel, je ne m’attendais pas à ça. Le public était vraiment chouette. Ils étaient cools, ils étaient dans l’ambiance. Ils étaient mouillés par contre, trempés même je dirai !

L.ch : On ne vous retrouvera malheureusement pas dans le Grand Journal de Canal + à la rentrée… Est-ce une pause ou un au revoir à votre carrière de présentatrice ? Souhaitez-vous vous consacrer désormais entièrement à la musique ?

C. M.: Non, c’est pas vraiment une pause car je continue sur MTV. Je rentre maintenant dans ma neuvième année. Ça fait 13 ans que je fais de la télé, le grand journal c’était juste une année, une invitation à une exposition autre que celle que j’aurais connu sur le câble. C’était une expérience.

L.ch : Comment faites-vous pour combiner les deux ?

C. M.: J’ai pu faire le Grand Journal parce qu’on était en fin de tournée du dernier album et on avait, entre guillemets, une pause. On a continué les concerts jusqu’en décembre et entre janvier et juin j’ai enregistré le nouvel album. C’était pareil en 2004, lorsque j’ai commencé à MTV. J’ai fait une émission en direct mais je n’ai pu tenir malheureusement qu’un an parce que la musique a pris le dessus. La musique, c’est ma passion. C’est ça qui est vital pour moi. Et la télé paye pour la musique, tout simplement (rires). Et en plus, ils m’offrent plein de jolis fringues ! Mais surtout c’est une autre expérience.

Propos recueillis par Sandra Hildebrandt

Photos : Sandra Hildebrandt ©


Pérou

Quand le blanc épouse le rouge

 

Après Sucre, la route continue vers San Pedro de Atacama au Chili. Ce voyage de trois jours recèle de merveilles offertes par la nature. Des paysages qui aspirent jusqu’a l’âme perdue au beau milieu d’une irréalité naturelle. Entre désert de sel et lagunes, les yeux sont débordés et ne peuvent qu’admirer.

Adieu Sucre! Adieu ta blancheur, ta générosité qui résonne dans les vallées andines alors que le bus avance vers Uyuni. Je ne t’oublierai pas. Tu me manques déjà. Tout autour les paysages offrent des contrastes saisissants. Ici, les alpagas boivent de l’eau, là, le soleil brûle le gazon. Est-ce l’altitude qui les rend si éblouissants? Est-ce le manque d’eau et l’aridité qui les rendent tellement éclatants? Peu importe les raisons, ces semis-déserts que je traverse tout comme le trajet de 11 heures m’évoquent l’immensité de la Bolivie qui s’en va gentiment.

Le bus arrive enfin a Uyuni. Cette ville sans charme est pourtant l’ouverture sur l’irréalité naturelle du Salar, ce désert de sel de plus 12’000 kilomètres carrés tout comme d’autres merveillles que mes yeux n’ont pas encore digérées. C’est ainsi qu’au lendemain de l’arrivée dans ce “No Man’s Land”, je pars pour 3 jours de “baffes paysageres” en direction de San Pedro de Atacama au Chili.

D’abord, il y a le Salar dont la blancheur rappelle la neige alors que c’est un plateau de sel où se rencontrent le sol et le ciel. L’horizon y propose seulement l’horizon et son infinité, qui se perdent si loin que les illusions sont légions. Quelques volcans entourent la plaine irréelle laissée là par un immense océan préhistorique asséché. Et puis, il y a l’autre merveille au milieu de la merveille blanche: la Isla del Pescado. Cette île s’érige hors du sel sur un sol de corail laissé là après l’assèchement de l’océan. On y trouve simplement une forêt de cactus variant entre 2 et 4 mètres de hauteur. Rien que ça! Rien d’exceptionnel naturellement! Surtout que tout autour de l’île, je n’aperçois qu’une mer de sel et quelques volcans.

Après une nuit dans un hôtel de sel, oui, un hôtel tout de sel jusqu’au lit, l’heure est venue de faire la tournée des lagunes du Sud Lipez. Chacune se caractérise par une couleur différente et héberge un nombre impressionnant de flamants. Les richesses minérales de la region permettent ces explosions de couleurs au milieu de volcans et autres sommets de plus de 5000 mètres d’altitude. L’Altiplano, cette plaine aride, forme le sol sur lequel nous roulons. C’est alors qu’en début d’apres-midi un miracle, et le plus beau paysage vu dans ma vie, se dévoile devant mes yeux: la Laguna Colorado.

Une lagune plantée a plus de 4500 metres d’altitude dont le rouge sang entoure un bleu roi ou les flamants s’épanouissent. Un endroit ou le vent réveille déja les plus beaux souvenirs. Des rochers noirs, des plantes jaunes et les sommets blancs forment ici le paysage. Même la lagune semble accueillir un peu de glace ou du sel? Le mystère reste entier. L’impression de n’être qu’un point noir au bord de cette explosion de couleurs foncées. L’humilité de quelques pas impressionnés, presque bloqués par le paysage plus que merveilleux. Même le froid disparait devant une telle majestuosité. Ne reste que cet air un peu stupide s’inclinant devant la magie de la Nature. Je tente d’écouter les sifflements du vent qui dessinent des vaguelettes sur l’eau hautement minéralisée. J’ai l’impression de voir un peintre dessiner son plus beau tableau juste sous mes yeux presque choqués par tant de beauté.


Après une nuit au bord de ce paradis terrestre, où les étoiles brillent comme nul part ailleurs, tangibles comme la terre du sol, la fin du voyage semble sans importance. Une étrange sensation puisque la dernière partie est également riche en “baffes paysagere”. Elle comprend un lever de soleil enfumé par les geysers, un arbre de pierre, un désert ressemblant aux peintures de Dali et la Laguna Verde reflétant le cône parfait du volcan Licancabur, culminant a 5’930 mètres. Tout ceci compose ainsi le dernier jour de ce voyage dans l’irréalité naturelle.

Très vite, la descente presque vertigineuse vers San Pedro au Chili termine ces trois jours époustouflants. En toile de fond, la ville est a portée de vue dans son oasis au milieu du désert d’Atacama. Dès l’arrivée dans son centre, l’impression d’entrer au Far West se manifeste. Les bâtiments tout comme les routes sont de terre rougeâtre. La nuit s’annonce par conséquent reposante.

A.W.

Photo : Alexandre Wälti ©