Au coeur de la photomobile – Un projet par et pour l’Ouverture


Attendre. C’est le quotidien des requérants d’asile du centre de Fontainemelon. C’est aussi celui des photographes, patients, dont l’oeil averti guette le moment propice. “L’Attente”, c’est le nom très sobre donné au projet, dont chacun se fait sa propre opinion. Rencontres autour de la photomobile.

 
Le projet est tout d’abord né autour d’une amitié, puis ce sont des collaborations qui ont vu le jour. L’association Ouverture, trois photographes : Gabriele Chirienti, Pierre-Alain Berger et Stan of Persia, ainsi que le centre d’accueil des requérants d’asile de Fontainemelon se sont rencontrés autour d’un même médiateur : la photomobile, c’est à dire l’utilisation d’un smartphone pour capturer des images. Sur un laps de temps court, avec la volonté d’un résultat immédiat, des personnes d’horizons différents ont mis sur pied un véritable travail basé sur l’échange et l’ouverture aux autres. Un projet verni le jeudi 5 novembre à Serrières, avec la présence des participants et des photographes. Les photos restent exposées jusqu’au dimanche 8 novembre et sont proposées en tirage unique à 50.- l’unité. Les bénéfices iront au profit de Médecins du Monde, afin de soutenir le projet Accueil Santé Asile, un programme de renforcement de l’accès aux soins et de prévention de la santé, destiné aux requérants d’asile du canton.

Pour les réfugiés, le smartphone symbolise l’éphémère, au travers de selfies surtout. “Le but pour nous était de leur montrer quelques techniques de photo, comment la photomobile pouvait devenir une manière de s’exprimer, de montrer comment ils vivent et de représenter des instants” déclare Gabriele Chirienti, “c’est un moyen de documenter la vie, mais surtout une ouverture aux autres en partageant sa vision du monde”. Selon lui, une expérience très enrichissante à vivre, intense également. En effet, lors de la première rencontre, une quarantaine de participants se sont manifestés, au final une dizaine a fourni un véritable travail. Il est difficile de concevoir l’impact qu’a eu le projet sur les requérants, “certains étaient plus touchés que d’autres par ce que nous leur proposions, ce sera peut-être visible sur du long terme, avec un peu de recul” relate Gabriele Chirienti.

Une ouverture aux autres par l’image, lorsque la barrière de la langue est parfois délicate. Pour les réfugiés c’est une façon de s’exprimer. “Pendant ces quelques jours, leur relation avec l’extérieur a changé, ils ont fait des visites en dehors du centre, et la photo leur a appris à s’ouvrir, leur regard s’est tourné vers autre chose” livre Leana Ebel, coordinatrice du centre de Fontainemelon. Des regards croisés qui, peut-être, peuvent avoir un impact sur les préjugés qui forgent la conscience collective. C’est l’un des buts principaux de cette collaboration : bousculer les consciences et les points de vue, au niveau de la société, mais aussi au niveau politique. L’ambition est belle, dans un contexte de crise migratoire abondamment documentée et médiatisée. “Ce qui manque c’est un médiateur” avoue Gabriele Chirienti, “et puis les dossiers ne sont pas traités assez rapidement, il y a parfois des attentes d’une, voire de plusieurs années; ce genre de projet ne peut peut-être rien changer politiquement mais peut au moins amener à la réflexion”. Leana Ebel relève les difficultés rencontrées à établir des relations sur le long terme : “Ici on est tributaires de ce qu’il se passe, il faut que l’on s’adapte sans cesse, c’est le leitmotiv en travaillant ici, à cause du statut provisoire de la situation des personnes qui passent dans le centre. C’est difficile de se projeter”.

L’attente. Elle se décline sous différents angles : d’une vie, d’un résultat, du travail d’un photographe ou d’une réponse positive, elle est universelle. Un dénominateur commun dans un cadre d’ouverture à l’autre. Réitérer un tel projet ? Peut-être, si une occasion similaire se présente, mais pas dans l’immédiat pour Gabriele. Car c’est un hymne au partage, un besoin d’expression que la photomobile permet de transmettre. Une éphéméride dans un quotidien instable, rempli de doutes et de frustration de cette énergie de vivre des requérants d’asile. Une expérience humaine à découvrir à Serrières, au sein des locaux de Fabrik:5.
NoAn. 

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