Films

Regardez-moi ! Si vous l’osez…

Parfaitement établi en tant que genre cinématographique, les films d’horreur existent sous diverses formes. Petit tour d’horizon des grandes familles des films qui font peur et de leurs meilleurs représentants. Commencez à trembler !

Nous sommes le 5 mars 1922. Ce jour-là, le réalisateur allemand Friedrich Wilhelm Murnau présente son nouveau film, « Nosferatu, une symphonie de l’horreur », une adaptation de « Dracula » de Bram Stoker. Les spectateurs présents sont terrorisés. Le cinéma d’horreur vient de naître. Depuis, les films qui font peur sont devenus un genre cinématographique à part entière, tout comme le sont les comédies ou les films policiers par exemple.
A l’instar d’autres émotions telles la joie ou la colère, la peur est un sentiment subjectif. Si bien que ce qui pourrait effrayer une certaine personne, pourrait en laisser une autre parfaitement indifférente. Tout comme chez les individus, la peur cinématographique n’est donc pas universelle. Elle se décline en plusieurs genres, dont voici les trois principaux :

LE FILM GORE : le but de ce genre de production n’est pas exactement de faire peur au spectateur. L’idée serait plutôt de le dégoûter avec des images particulièrement choquantes (des corps en décomposition par exemple). Amateur ? Vous devriez alors trouver votre compte avec « Cabin Fever » (Eli Roth, 2002)  ou « Hostel » (id., 2005). Le premier nous montre les ravages d’un virus rongeur de chaire sur une équipe de jeunes vacanciers ; le second raconte l’histoire de touristes capturés, puis torturés par des gens bizarres. Les plus téméraires pourront aussi regarder « Cannibal Holocaust » (Ruggero Deodato, 1980), que je n’ai pas vu pour ma part. Considéré comme le film le plus gore de tous les temps, il nous fait part des soucis d’une équipe de reporter aux prises avec une tribu anthropophage. Signalons par ailleurs cette anecdote plutôt terrifiante qui accompagne le film de Deodato : pour rendre leur produit plus effrayant encore, les producteurs de « Cannibal Holocaust » ont laissé entendre que le film avait été tourné sans aucun trucage et que certains acteurs étaient réellement morts durant le tournage. Devant le réalisme de certaines scènes, la justice italienne a alors accusé Deodato d’avoir tourné un snuff movie (film montrant de véritables meurtres). Pour se défendre, celui-ci a dû prouver que ses acteurs étaient toujours en vie. Pour certains cependant, le doute subsiste encore…
Dans la catégorie gore, on peut aussi ranger les films de zombies, genre inventé par George A. Romero en 1978 avec « La Nuit des Morts-vivants ». Ce dernier ayant pris un sacré coup de vieux, je vous conseille de découvrir son remake, l’excellent « L’Armée des Morts » (Zack Snyder, 2004) ou de voir le tout aussi excellent « Territoire des Morts » (Romero, 2005), qui n’est autre que la deuxième suite de « La Nuits des Morts-vivants ». Et si vous aimez vraiment les zombies, je vous recommande vivement « Shaun of the Dead » (Edgar Wright, 2003), qui, même s’il est plus une comédie qu’un film d’horreur, demeure un classique du genre mort-vivant !

LE SLASHER MOVIE : ce type de films met en scène un groupe d’adolescents fuyant devant un assassin sanguinaire, qui trouve toujours des idées originales pour tuer les gens (en anglais, to slash veut dire taillader!). L’un des tous premiers slasher movie a été « Massacre à la tronçonneuse » (Tobe Hooper, 1974, pas vu), dont le titre est assez évocateur. Quelques années plus tard, deux tueurs tristement célèbres viendront hanter de nombreux spectateurs. Il s’agit du démoniaque Michael Myers et de son inquiétant masque blanc dans « Halloween, la nuit des masques » (John Carpenter, 1978), et du diabolique Jason Voorhes, facilement reconnaissable à son masque de hockeyeur dans « Vendredi 13 » (Sean S. Cunningham, 1980, pas vu).
Dans les slasher movie, le tueur peut prendre des aspects variables. Il peut se présenter sous la forme d’un croquemitaine, comme dans « Les Griffes de la Nuit » (Wes Craven, 1984), première apparition au cinéma d’une certain Freddy Krueger, ou « Jeepers Creepers I et II » (Victor Salva, 2000 et 2002). Il peut également s’agir de frères cannibales, comme dans le très réussi « Détour mortel » (Rob Scmidt, 2002). Plus original, l’assassin peut être la mort elle-même (« Destination finale », James Wong, 2000).
Mais le meilleur slasher movie reste à mes yeux l’extraordinaire « Scream » (Wes Craven, 1996), dans lequel le réalisateur s’amuse à jongler avec les références et les codes du genre avec une maestria impressionnante. Vous pouvez y apprendre aussi les trois règles d’or qui vous permettront de survivre s’il vous arrive, un jour, d’avoir affaire à un tueur en série : 1/ pas de sexe (les vierges s’en sortent toujours) ; 2/ ni alcool, ni drogue (car premièrement ce sont des produits avilissants, et deuxièmement ils conduisent souvent à l’infraction de la première règle) ; 3/ ne jamais dire, en sortant d’une pièce, « je reviens tout de suite »…

LE FILM D’ÉPOUVANTE : c’est au sein de cette catégorie que l’on trouve généralement les films les plus effrayants. Dans ce genre de films, la peur, au lieu d’être affichée, est la plus part du temps suggérée, ce qui la rend bien plus efficace. Les réalisateurs de films d’épouvante jouent souvent avec les peurs ancestrales des spectateurs : les fantômes et autres apparitions surnaturelles, la peur du noir, la peur des espaces confinés, ou au contraire des grands espaces vides,… La musique, les bruitages, les décors et les prises de vue occupent alors un rôle très important dans le processus de la peur. A ce titre,  « Le Projet Blair Witch » (Daniel Myrick et Eduardo Sanchez, 1999), « The Ring » (Gore Verbinski, 2002), « Les Autres » (Alejandro Amenabar, 2001), ou encore «The Grudge » (Takashi Shimizu, 2004) devraient vous valoir quelques cauchemars.
Mais pour ceux qui recherchent le Grand Frisson, je leur suggère de voir le film qui est à mes yeux le plus terrifiant de toute l’histoire du cinéma : « The Shining » (Stanley Kubrick, 1980). Adapté d’un roman de Stephen King, le film raconte l’histoire d’un écrivain qui accepte de garder un hôtel pendant un hiver, seul avec sa femme et son fils. Très rapidement, alors qu’il sentira les effets terribles de l’isolement, son fils, grâce à un pouvoir de médium, ne cessera d’apercevoir les deux petites filles massacrées à la hache par leur père quelques années auparavant. Comment ne pas trembler devant le regard halluciné de Jack Nicholson, les visions macabres du petit Dany ou les interminables couloirs de cet hôtel maudit où règne un silence menaçant… Le tout magistralement orchestré par Stanley Kubrick, avec en prime la musique tétanisante de Wendy Carlos : un chef d’œuvre inégalé en matière de frayeur.

Précisons que de nombreux films mériteraient d’avoir leur place dans ce petit tour d’horizon, parmi lesquels quelques classiques du cinéma d’horreur : « L’exorciste » (William Friedkin, 1973), « Psychose » (Alfred Hitchcock, 1960), « Amityville, la maison du Diable » (Stuart Rosenberg, 1979) ou encore « La colline a des yeux » (Wes Craven, 1977). Ne les ayant vu, je ne saurai pouvoir vous les (dé)conseiller ! Mais leur réputation en matière de frissons n’est plus à faire. Aussi si vous l’osez…

Didier Nieto

Evénement

Dionysiaque débauche :

Neuchâtel une fois l’an tonne au nom de la vigne

Encore une année de plus au compteur des adeptes des fêtes à prétexte. Pendant que les enfants jouent sur les carrousels, les grands titubent dans les rues étroites et déformées de la cité médiévale à la recherche d’on ne sait quoi.

La fête des vendanges, comme son nom l’indique, est la fête qui correspond à la période de récolte du raisin, tout le monde s’accordera à le reconnaître. Auparavant, ce genre d’évènement correspondait au ban des vendanges c’est-à-dire la date autorisant le début de la récolte. Mais aujourd’hui, qu’en est il de ces fameux raisins ? Quelqu’un sait-il où le vin a-t-il bien pu passer ? On est en droit de se le demander.

Vendredi 22 septembre, forains, taverniers, aubergistes et troubadours s’affairent. Un univers est à créer : à en croire la coutume, le lieu du culte des adorateurs de vignes doit prendre forme avant la tombée de la nuit. Cela dit, contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ce ne sont pas ces beaux vieux tonneaux de vinasse que l’on fait rouler jusqu’aux échoppes, mais de gros fûts métalliques que l’on raccorde à une pompe. Des enseignes se hissent au dessus des baraques : Heineken, Cardinal, Smirnoff ou J&B. Les gens qui préparent le lieu de l’orgie ne parlent ni château ni cépage, l’ambiance semble être à l’organisation efficace. Ce soir, des milliers de païens ont rendez-vous ici même pour fêter les joies du dieu errant.

Au programme de ce joyeux rassemblement local, cortège des enfants, parade des fanfares et corso fleuri. De belles et saines activités en perspectives! Seulement voilà, la nuit tombée, cet énorme bazar aux mille loupiottes prend une tout autre allure. Le sacre de la boisson des dieux peut commencer. Les enfants à présent couchés, plus de temps à perdre. Dans les rues de la ville habituellement paisible, l’atmosphère est au bruit et à la cohue. On a l’impression que chaque coin d’espace concourt l’autre pour celui qui fera vibrer la terre avec le plus de robustesse. Entre les célébrations de Claude François et du Death Métal, on se bouscule pour trouver la mélodie de ses rêves. Le vin brunâtre de la région d’Heineken coule à flot. Ce soir, les fonctionnaires de jour sont les chamanes de la nuit. On peut se déhancher à sa guise, on peut rigoler, on peut danser, on peut aspirer à rencontrer la personne de son choix, sans gêne ni tracas. C’est la fête du vin, c’est la fête des vendanges. Pendant trois jours, Neuchâtel sera méconnaissable, les habitués le savent bien. On fête le vin sans le boire, qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse. Peu importe ce que l’on boira, peu importe pourquoi on est là. On marquera le temps, une année de plus et cela fait plus de cent ans que cela dure.

« La Fête des vendanges ». Voilà une fête dont le nom ressemble étrangement à ces racines grecques ou latines que l’on étudie sur les bancs de l’école. Un nom tel un vestige du passé dont la trace est avant tout la marque des cultures en permanente évolution. Si la boisson des dieux n’est peut-être plus aujourd’hui la raison même de cette extraordinaire agrégation de débauches, le vin reste pourtant le métronome de l’évènement. Car « Il faut toujours semer derrière soi un prétexte pour revenir, quand on part. ». (A. Baricco, « Océan mer »)
Nicolas Hanssens