Musique

Björk à Paléo, festival où tout est possible

Paléo ne peut pas laisser indifférent : 32 éditions et le record de 4 millions de spectateurs au total.
L’édition 2007 se présente avec 160 artistes et une affluence de 225 000 personnes parmi lesquelles la soussignée qui n’a pas voulu perdre l’occasion d’assister à la performance d’une des artistes les plus intrigantes de la scène contemporaine, l’islandaise Björk.

Pourtant, comme toutes les années le programme du Paléo présentait beaucoup d’autres têtes d’affiches comme Muse, Tryo, Pink et Gad et des découvertes dans les domaines du rock, de la chanson française, des musiques du monde, du reggae, du hip hop, de la musique classique ou encore du théâtre de rue.
Au début de la soirée, on voit le public qui se met à l’aise par le concert de Donavon Frankenreiter, un  californien qui avec son rock n’ roll relax et fait entrer dans l’ambiance folk et multiethnique du festival.
A l’instar d’autres années il y avait 100 différents stands qui proposés des objets et des mets du monde entier et d’autres scènes musicales. Le spectateur peut ainsi apprécier l’indie-rock d’un groupe du sud: « Clap your hands say yeah ».
Dans la grande scène il y était l’autre attraction de la soirée, le groupe  québécois , « Arcade fire », composé par de nombreux musiciens qui font usage d’un large éventail d’instruments de musique : guitare, batterie, basse, piano, alto, violoncelle, xylophone, accordéon et harpe. La plupart des musiciens jouent plusieurs instruments et changent de ces derniers pendant le concert. Cela crée une sympathique confusion s’accordant à merveille à l’intonation du festival.
Puis, la nuit est tombée, comme pour créer une ambiance féerique apte à accueillir l’elfe islandais, qui a commencé son concert énergiquement avec la chanson « Earth Intruders », tirée de son dernier album « Volta ».
Cet album est assez particulier, dans ses chansons, Björk joue le rôle de « mère nature » qui se révolte contre la cruauté des êtres humains. De chanson en chanson, la rage de « mère nature » et le « voltage » de sa voix ne cessent de croître. Un concert particulier et très énergique.
L’islandaise n’a pas présenté que son dernier travail. Elle a parcourut tout son bagage musical en chantant des perles comme : « All Is Full Of Love », « Bachellorette » ou encore « Yoga »
Ce qui frappe le plus en écoutant les chansons de Björk, outre sa voix puissante, c’est sa façon étrange de scander les syllabes, qui semble provenir de la tradition médiéval islandaise et donne une touche magique à sa musique, la rendant presque extraterrestre.
La chanteuse était accompagnée par un groupe d’instruments à vent venant aussi d’Islande et par quelques autres musiciens de prestige.
Tout le concert était électrisant, l’énergie de Björk, qui bouge sur sa musique comme une petite fille et le voltage étourdissant de sa voix laissent le public interloqué.
Le concert s’est terminé très dignement avec « Declare Indipendence », autre chanson tirée de son dernier travail.
Paléo a vraiment surprit avec sa pluralité de style musicaux et de cultures. C’est aussi sûrement grâce à ça qu’il permet d’entendre des musiques qui ne paraissent pas tout à fait terrestres.
L.G.

Cinéma

Palmarès du 60ème festival international du film de Locarno

C’est à la fin d’une dizaine de jours au temps mitigé que le 60e festival international du film de Locarno a accouché de son vainqueur.
A la surprise générale, le jury a couronné le film « Ay No Yokan » (Pressentiment d’amour) du réalisateur japonais Masahiro Kobayashi qui a donc remporté le léopard d’or. Par ce choix courageux, le jury se démarque du cinéma traditionnel pour couronner un film d’auteur exigeant et complexe.

Présenté le 7 août, Ay No Yokan est introduit par son réalisateur comme « un film qui plonge au centre de l’humain, où l’image est plus importante que les dialogues ». Lors de la première, l’auteur, bien au fait de la difficulté d’accessibilité de son film, provoqua l’hilarité générale quand il déclara que ceux qui avaient fait bombance la veille pouvait dormir mais qu’il était du devoir de leurs voisins de les réveiller !

Kobayashi propose un film axé sur la répétition et la solitude. Il suit le destin d’un homme et d’une femme dont la fille du premier a été tuée par celle de la deuxième. Ayant refusé le pardon demandé par la mère de la meurtrière, l’homme, veuf, abandonne son métier en ville pour partir dans une petite ville de campagne et y travailler dans une usine. Chaque jour, le même rituel se produit. Il part au travail, rentre, va manger à l’auberge puis dormir. Pourtant dans cette même auberge travaille la mère de la meurtrière qui, elle aussi, vit chaque jour une répétition de la journée précédente. Bien que les deux se soient reconnus, ils ne se regardent et ne se parlent même pas. Pourtant jour après jour, répétition après répétition, le destin fait qu’ils s’ouvrent de plus en plus et finalement décide de communiquer jusqu’à développer un pardon et ce « pressentiment amoureux ».

Le film joue sur la répétition à outrance et la succession de plans identiques, ceci provoquant chez le spectateur une même routine que les personnages. Par ce procédé quelque peu désarçonnant, l’auteur force le public à souhaiter que les personnages brisent enfin leur rituel afin d’extérioriser leurs sentiments enfouis. Là où Kobayashi filme ce qui devrait être du cinéma, il en ressort que son histoire dépeint la vie telle qu’elle est, avec son lot de répétitions et de souffrances dissimulées. À l’inverse du cinéma nippon épileptique, l’auteur revient à ce qu’il nomme « les sources du cinéma». C’est-à-dire, le cinéma des images, le cinéma muet (plus d’une heure et demie sans dialogues).

Le prix récompense donc un film assez ingrat pour le spectateur à la première vision, mais qui prend tout son sens à sa conclusion. Et en lieu et place, d’un film célébrant l’indigeste mode futile du cinéma d’auteur ennuyeux incompréhensible aux non-initiés, on sort de la salle obscure avec l’intime sentiment d’un film extrêmement fort touchant nos fêlures profondes. Et à cet instant on se dit que l’humain prend sa valeur par le fait de briser son amour-propre en ouvrant son coeur.
Jan Haesler