Un enfant qui bouge ? Mon Dieu, il est hyperactif !!!
Inattention, impulsivité, agitation, désobéissance et lenteur intellectuelle résumeraient à eux seuls l’hyperactivité. Pourtant, le problème est bien plus complexe que ça. Cette pathologie plus souvent attribuée à l’enfant représenterait aujourd’hui pour de nombreux spécialistes un fléau. En effet, selon une étude de l’AAP (American Academy of Pediatrics), l’hyperactivité toucherait 8 à 10% des enfants scolarisés aux Etats-Unis. En Suisse, on est plus raisonnable, un article du Femina fait état de 1 enfant sur 50 concerné.
Force est de constater que la question de l’hyperactivité est centrale. Partout, on en parle : émissions télévisées, reportages radiophoniques, forums internet… La société s’interroge : les origines ? Les symptômes ? Les solutions ?
Les réponses, quant à elles, fusent dans tous les sens, sur le net les forums pullulent, les médecins se contredisent, les chiffres ne sont pas clairs. En résumé, les parents sont perdus, désarçonnés, impuissants. En outre, il est bien connu que plus on expose une inquiétude sur le devant de la scène, plus on a de chance d’en faire une psychose. Autrement dit, plus on parlera d’hyperactivité, plus les parents se sentiront concernés. Trop d’enfants seraient alors déclarés hyperactifs, alors que parfois ils ne le sont même pas. Certes, il existe indéniablement des enfants hyperactifs pour lesquels des mesures doivent être prises, mais il n’est pas justifié de coller l’étiquette « hyperactif » sur le front de tous les enfants qui font un pas de travers. Par conséquent, on assiste à une vulgarisation trop extrême du problème qui pourrait porter préjudice à la fois à ces enfants faussement stigmatisés, mais aussi aux véritables hyperactifs.
Les origines de cette pathologie sont également peu claires. Si certains considèrent que la télévision et les jeux vidéos sont des causes majeures, d’autres parlent de colorants alimentaires, ou encore de maladie génétique. Dans tous les cas, l’hyperactivité est une pathologie jeune liée d’une manière ou d’une autre aux grands bouleversements qu’a connus le XXème siècle.
Tout d’abord, la découverte de l’hyperactivité accompagne l’émergence de la psychologie qui se donne pour tâche d’étudier scientifiquement des faits psychologiques et des comportements. Ainsi, de nouvelles pathologies, à l’instar de l’hyperactivité, ont pu être reconnues et envisagées sous l’angle de cause à effet.
Ensuite, la société de consommation a permis l’émergence de produits nouveaux et « excitants » : dans un premier temps alimentaires (bonbons sucrés, boissons énergisantes) ; dans un second temps divertissants (jeux vidéos et films, sports stimulants).
Enfin, le rôle des parents a changé, notamment celui de la mère qui n’est plus seulement cantonné à l’éducation des enfants. Séparés de leurs parents, ils sont souvent placés en garderie et trop vite confrontés au monde extérieur.
L’enfant dans tout ça subit, doit se conformer aux attentes nouvelles d’une société en perpétuel mouvement qui exige d’eux dynamisme, intelligence, obéissance, curiosité, mais pas trop (ni pas assez d’ailleurs) sinon les parents sont montrés du doigt et ils ont honte. Ils doivent alors trouver une excuse… l’hyperactivité !!!
Après ce diagnostic, une solution s’impose. La Ritaline semble être sur les lèvres de beaucoup de médecins. En effet, ce médicament, proche des amphétamines, est utilisé pour les troubles de l’attention et de l’hyperactivité chez l’enfant. Mais c’est à ce niveau que se pose un problème éthique : est-il moral d’administrer à des enfants un tel médicament aussi connu sous le nom de « kiddy coke », soit « la coke du gosse » ? A en voir les chiffres, la réponse serait positive, puisque plusieurs sources font état de plus de 8 millions d’enfants entre 3 et 20 ans sous Ritaline aux Etats-Unis aujourd’hui. En Suisse, à Neuchâtel, une étude de l’OFSP fait état d’une quantité totale de Ritaline prescrite multipliée par sept entre 1996 et 2000, avec un nombre de patients sous traitement passant de 76 à 433. Plus récemment, une enquête menée auprès du corps médical vaudois en 2005 parle d’une médication par Ritaline prescrite dans 90% des cas.
The American Academy of child and adolescent psychiatry crie au scandale dans une étude parue en 2007 stipulant que « l’échec scolaire, la toxicomanie et les conduites prédélinquantes présentent statistiquement la même fréquence que les sujets hyperactifs aient été traités ou non avec des psychostimulants de type Ritaline quand ils étaient petits ». Par conséquent, bien que l’effet du médicament ne règle les choses qu’à court terme, les chiffres démontrent que les enfants turbulents seraient trop facilement traités par voie médicamenteuse au détriment d’approches plus douces. Cependant, trop rapidement prescrite, la Ritaline ne constituerait-elle pas un moyen pour des parents absorbés par leur travail de se décharger de la tâche de bien éduquer leurs enfants ?
F.G. Fabien Grenon