Voyager en avion avec son sac, une « sinécure » ?

Le Parlement Européen a récemment pris une décision historique qui pourrait bouleverser le modèle économique des compagnies aériennes, notamment celles du secteur low-cost. En effet, la Commission des Transports de l’Union Européenne a voté en faveur de l’interdiction des frais supplémentaires pour les bagages à main. Cette décision pourrait mettre un terme à des pratiques qui, pour de nombreux passagers, étaient devenues de plus en plus fréquentes et coûteuses.

Une décision favorable aux passagers

Le 6 juin dernier, le Conseil de l’Union Européenne avait adopté une proposition de règlement autorisant les compagnies aériennes à facturer des frais pour les bagages à main. Cependant, cette mesure a été largement rejetée par la Commission des Transports du Parlement Européen, avec 38 votes sur 42, marquant ainsi un revers pour les compagnies aériennes et un soutien fort aux droits des consommateurs.

Cette décision a été saluée par de nombreux gouvernements, notamment celui de l’Espagne, qui s’était déjà opposé à la proposition en juin. L’Espagne, par l’intermédiaire de son ministère des Droits Sociaux et de la Consommation, a également récemment infligé une amende de 179 millions d’euros à plusieurs compagnies aériennes pour des pratiques jugées abusives, notamment pour le frais supplémentaire imposé sur les bagages à main en cabine.

La montée en puissance des frais pour les bagages à main

Depuis le début des années 2000, avec l’explosion des compagnies aériennes low-cost, les frais pour les bagages en soute étaient devenus monnaie courante. Mais ces dernières années, une nouvelle tendance a vu le jour : la facturation des bagages à main. Initialement, les passagers pouvaient emporter une petite valise ou un sac à dos en cabine sans frais supplémentaires. Cependant, des compagnies comme Ryanair, Wizz Air et EasyJet ont commencé à facturer des frais supplémentaires pour un bagage cabine, même si celui-ci respectait les dimensions standard.

Ces frais peuvent parfois dépasser les 50 euros par vol, soit un montant supérieur au prix même du billet pour un vol à bas prix. Cette évolution a généré une frustration croissante parmi les passagers, qui ne s’attendaient pas à ces frais non, ou mal annoncés au moment de l’achat de leur billet. Pour de nombreux consommateurs, cela va à l’encontre de la transparence et de la clarté des prix.

Le verdict de la justice européenne

La Cour de justice de l’Union Européenne avait déjà pris position sur la question en 2014, en déclarant que le bagage à main fait partie intégrante du transport aérien et ne peut être soumis à des frais supplémentaires. Cette décision se base sur l’argument que le bagage à main est un élément essentiel pour le passager, qui ne pourrait raisonnablement voyager sans ses effets personnels essentiels.

Le règlement européen stipule également que la facturation d’un supplément pour les bagages à main constitue une surcharge non optionnelle, et donc, selon la jurisprudence de la Cour, une pratique commerciale déloyale. Ce principe a été renforcé par la résolution de l’Assemblée Européenne en octobre 2023, invitant les États membres à veiller au respect de cet arrêt de la CJUE, tout en appelant à une harmonisation des réglementations sur la taille et le poids des bagages à main.

La position de l’Association des Compagnies Aériennes

L’Association des lignes aériennes (ALA) a exprimé son mécontentement face à cette décision. Selon l’ALA, interdire aux compagnies aériennes de facturer des frais supplémentaires pour le bagage cabine pourrait nuire à la liberté des passagers de choisir les services qu’ils souhaitent inclure dans leur vol. L’association estime que cette mesure pourrait créer une confusion parmi les voyageurs qui préfèrent avoir une certaine flexibilité dans le choix des services.

Cependant, le vote du Parlement Européen semble se concentrer sur la protection des consommateurs. Les frais supplémentaires pour les bagages à main sont perçus par de nombreux passagers comme une forme de « prix caché » qui déforme le véritable coût du vol. De plus, les compagnies aériennes, en particulier celles à bas coûts, ont de plus en plus recours à ce genre de pratiques pour augmenter leurs marges bénéficiaires.

L’avenir des frais de bagages à main

Malgré ce vote du Parlement Européen, le processus législatif n’est pas encore terminé. Le règlement devra encore être validé par les institutions européennes, ce qui signifie que la politique actuelle sur les frais de bagages à main pourrait rester en vigueur pour l’instant. Toutefois, les signes sont clairs : les compagnies aériennes devront probablement revoir leur politique tarifaire en ce qui concerne les bagages à main, et cela pourrait marquer la fin des frais supplémentaires pour de nombreux passagers.

Cette décision de la Commission des Transports pourrait également conduire à une plus grande standardisation des règles concernant la taille et le poids des bagages à main. Actuellement, chaque compagnie aérienne fixe ses propres limites, ce qui peut créer de la confusion et des frictions avec les passagers.

Une victoire pour les consommateurs

La récente décision du Parlement Européen est une victoire majeure pour les passagers et les défenseurs des droits des consommateurs. Elle renforce l’idée que certains services essentiels, comme le transport d’un bagage à main, ne doivent pas être soumis à des frais supplémentaires. Alors que les compagnies aériennes continuent de se battre pour conserver leurs sources de revenus, l’Union Européenne semble de plus en plus déterminée à protéger les intérêts des consommateurs en matière de transport aérien.

Cela pourrait également marquer un tournant dans la manière dont les compagnies aériennes structureront leurs tarifs à l’avenir, avec une pression croissante pour une plus grande transparence et une meilleure protection des droits des passagers. En attendant, les voyageurs peuvent se réjouir de la fin prochaine de cette pratique jugée injuste et déloyale, et se préparer à des vols plus transparents et plus équitables.
V.vA.

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