28 septembre 2014 – votations fédérales – alors que le peuple suisse est plongé dans une attente interminable depuis des mois, le verdict tombe : l’initiative fédérale populaire pour une caisse maladie unique est refusée. Submergés par une vague de refus, seuls 4 cantons romands ont voté « oui ».
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« La chasse aux bons risques doit être supprimée. Il en va du respect de la dignité de toutes les personnes, qu’elles soient malades ou en bonne santé, jeunes ou âgées ». Tels ont été les mots de la conseillère aux Etats Liliane Maury Pasquier (PS) à propos de l’initiative pour une caisse publique.Des mots qui, à l’image du peuple suisse, marquent l’indignation croissante face à l’explosion des primes et au lobby des caisses privées. Cette dissension marquée n’est pas novatrice. En effet, après deux premières initiatives froidement essuyées en 2003 et 2007, les socialistes et les Verts avaient tenté une réapparition sur le devant de la scène en remettant le projet à l’ordre du jour. Mais quelle ne fut pas leur déception quand ils se virent récompensés par 61,9% de « non ».
L’intérêt principal soulevé par ce résultat tranché réside dans l’antagonisme qui a opposé les cantons romands et alémaniques. En effet, alors que 100% des territoires alémaniques ont refusé l’initiative, seul 40% des cantons romands l’ont déclinée. Dès lors, comment expliquer une telle différence ?
Il semblerait que la réponse réside dans les divergences au sein des mentalités. En effet, non seulement au niveau du rôle de l’état, mais aussi dans le domaine de la santé, les disparités sont fortes. La tendance alémanique semble être à la méfiance, vis-à-vis d’une centralisation en matière de santé. La peur d’être livré à une caisse maladie unique serait en effet « effrayante» pour bons nombre d’entre eux, souligne le Blick. Certains y perçoivent même le risque d’une emprise de la machine étatique. Face à cette position tranchée, les romands auraient « tendance à s’en remettre à l’Etat comme père protecteur, un surmoi freudien qui doit faire le bien à notre place » explique l’ancien président Pascal Couchepin.
De plus, le problème lié aux primes exhaustives vient alimenter les débats. Considérés comme de« grands consommateurs de soins » par le Temps, les romands paieraient en moyenne plus de primes que les alémaniques. En tenant compte du fait que le montant des primes augmentera de plus de 4%pour l’année 2015, il semble inévitable de constater un ras-le-bol généralisé au sein de la population latine.
Mais il subsiste un dernier point qui pourrait être à l’origine de cette séparation. Une notion parfaitement mise en évidence dans les propos de René Knüsel qui insiste sur la différence de représentations des assurances qui existe entre les régions. «En Suisse alémanique, un rapport plus convivial subsiste avec son assureur, sur le modèle de ce qui existait dans le passé avec les mutuelles. Les gens sont en outre globalement plus convaincus des vertus de la concurrence. En Suisse romande,la caisse publique est perçue par beaucoup comme une solution de repli face aux tendances bureaucratique et affairiste des caisses.»
Pour tenter de mettre un terme aux discordes qui règnent dans le climat suisse, un projet lancé par le socialiste Pierre Yves Maillard vise la constitution d’une caisse maladie régionale romande. Cette ébauche constitue-t-elle une solution adéquate au problème de fond ? Nous le verrons dans les mois qui suivent. En attendant, aucune solution durable n’a vu le jour, et la question de la caisse maladie reste un sujet virulent au sein du peuple suisse.
A.M