Le meilleur chanteur des années 2000 : l’Auto-tune !
Depuis quelques décennies, les domaines de l’art, du sport ou encore de la publicité sont entachés par de fausses performances, sublimés par une perfection illusoire. La cause principale ? La technologie. Les retouches abusives des photos et le dopage dans le sport ne sont pas récents. Cependant, la musique a connu une révolution technologique depuis une petite dizaine d’années : l’Auto-tune.
Le « Cher Effect »
Développé en 1997, l’Auto-tune était alors un secret bien gardé par les maisons de disque, utilisé discrètement pour corriger la justesse de la voix de leurs protégés. C’est en 1998 que le logiciel est utilisé comme un nouvel effet à part entière dans le tube « Believe » interprété par Cher. Cet effet robotisé n’est pas passé inaperçu, surnommé le « Cher Effect », il est en fait issu de réglages extrêmes sur Auto-tune. Depuis, le logiciel s’est popularisé et il est utilisé par de nombreux chanteurs pour son effet robotisé ou tout simplement pour chanter juste. C’est le rappeur T-Pain qui a remis au goût du jour le « Cher Effect » en réglant les changements de fréquences de l’Auto-tune à l’extrême pour obtenir la voix la plus électronique possible.
On peut aimer ou ne pas aimer le « Cher Effect », cela reste une affaire de goût artistique. Les artistes utilisant la technologie dans leur musique ne datent pas d’hier : Peter Frampton et sa Talk-box, Stevie Wonder et le vocoder ou encore Jimi Hendrix et sa pédale wah-wah en sont quelques exemples (bien que ses trois effets n’étaient pas informatiques et demandaient une plus grande maîtrise musicale). En revanche, ce qui est plus critiqué est la capacité d’Auto-tune à améliorer la justesse de la voix. Il n’est plus question d’un choix artistique, d’un effet ou d’une recherche de style. Il s’agit purement et simplement de tricher.
Chanter juste, un jeu d’enfant.
En effet, n’importe qui peut chanter juste avec l’aide d’Auto-tune. Cependant, plus une personne chante faux, plus le logiciel aura un effet superficiel sur la voix. Il faut donc savoir chanter un minimum. Le logiciel est aussi utilisé pour corriger quelques fausses notes de chanteurs reconnus comme talentueux. Alain Morisod nous apprend dans un interview accordé à la TSR que « lui, Céline Dion, tout le monde le fait ! ». Cependant, nombreux sont les chanteurs qui ont réussi grâce à leur physique ou à leur célébrité dans d’autres domaines plutôt qu’à leur talent musical. Auto-tune ne fait que faciliter la vie à ses imposteurs à la plastique parfaite et remplir les poches de leurs producteurs. Certains artistes, Kanye West par exemple, utilisent même le logiciel sur scène. Un concert est censé être différent d’un album studio, un moment de partage réel et intime entre l’artiste et le public… A quoi bon être chanteur si l’on n’a pas le talent pour s’exprimer sur scène sans tricher ?
Notre oreille s’habitue à une perfection irréelle, à une voix uniformisée, à une norme que seuls les logiciels peuvent atteindre. Le charisme, l’authenticité et la spontanéité sont des valeurs qui se perdent dans la musique populaire au profit de la perfection de la voix autant que du physique de l’interprète. Une note un peu dissonante de Louis Armstrong n’a-t-elle pas bien plus de charme qu’une note électroniquement parfaite et sans âme de Kanye West ?
S.R.
Pour en savoir plus :
http://next.liberation.fr/musique/01012356814-comment-auto-tune-a-tue-les-fausses-notes