Le coaching: dernier gadget de notre société ou solution?

Les sociétés sont faites de modes et d’habitudes allant et venant au gré des époques et des besoins. Aujourd’hui, la tendance est à l’offre d’un maximum de services liés à toutes sortes d’exigences physiques, psychiques, spirituelles, ou encore émotionnelles. Le coaching est une prestation auxquels les gens ont de plus en plus recours. Rencontre avec deux coachs, Denis Jaccard et Raymond Gafner, aux spécialités différentes mais qui se rejoignent dans leurs aspirations.
Deborah Sohlbank

Vivre. Vivre en société. Qu’est-ce que une « société »? Voici la définition donnée par un dictionnaire classique: « Ensemble des individus entre lesquels existent des rapports durables et organisés, le plus souvent établis en institutions et garantis par des sanctions; milieu humain par rapport aux individus, ensemble des forces du milieu agissant sur les individus ». Il ressort une idée de collectivité, tout comme celle d’individu, de personne. Comment permettre à l’un d’exister sans pour autant être étouffé par l’autre? Cela n’est pas toujours facile. Nous vivons une époque paradoxale: notre société aisée qui peut se targuer de pouvoir combler tous les besoins et envies possibles est en même temps très exigeante avec l’individu. On lui demande son temps, son énergie, son efficacité maximale. De nombreuses pressions existent autour de nos performances physiques, professionnelles et relationnelles. Fonctionnement d’une société, répercussions directes sur l’individu. Coexistence de beau et de bobos.

Le coaching, un service payant pour par exemple « apprendre à être heureux » ou à « gérer le stress », ne serait-il pas le fruit direct de cette situation paradoxale?  Peut-être. Mais les besoins sont là. Et si un coaching « intelligent », loin de l’idée d’un mentor dont on ne saurait se passer, était une solution intéressante, pour qui ne ressent pas le besoin de passer par un psychologue?

Jeudi 18 mai, 20 heures. Denis Jaccard donne une conférence à Neuchâtel intitulée: « Surmonter les émotions bloquantes ». La salle est pleine, beaucoup d’auditeurs semblent être des habitués: on se reconnaît, on discute. Le conférencier, l’air engageant, souriant et visiblement très sympathique à l’auditoire s’est donné pour but ce soir la transmission d’une technique simple et applicable par n’importe qui pour se libérer d’une émotion ou d’une douleur physique trop envahissante. En plus des conférences gratuites qu’il donne une fois par mois, Denis Jaccard est  hypnothérapeute et coach de vie depuis trois ans. Insatisfait en tant que formateur en informatique, il entame  alors une formation de trois ans qui lui permet aujourd’hui de proposer son aide aux personnes cherchant à transformer leur problème en solutions. Très vite, il s’éloigne de l’acception communément reçue autour du coaching.  » Je me suis rendu compte que  la seule idée « d’optimisation maximale » n’était pas possible dans une démarche de travail personnel. Je vois mon travail comme un accompagnement visant à aider une personne à se reconnecter à ses ressources. L’aspect « développement des performances », « faire toujours plus et mieux » peut porter préjudice, car finalement, dans cette optique, plus les gens en font, moins bien ils se portent. J’ai donc fait certains virages et ai amené une dimension thérapeutique à mon travail. » Ce complément thérapeutique a la particularité d’être éloigné de la conception freudienne de la thérapie dont l’Europe est profondément marquée: il existe des thérapies brèves constituées de nombreuses techniques développées aux Etats-Unis (entre autres: l’auto-hypnose, la PNL , l’EFT , l’EMDR ) pouvant agir très rapidement sur le patient sans pour autant passer par une phase pénible de retour sur un passé traumatisant. Il traite divers maux: problèmes de couple, manque de confiance, troubles alimentaire, allergies, dépendances ou douleurs chroniques.  » Si les gens ont recours à de tels services, dit-il de sa voix grave, c’est peut-être parce qu’aujourd’hui, notre société laisse trop de place à l' »avoir » et au « faire » et ceci au dépens de l' »être ». Nous avons perdu la capacité d’écouter les autres et soi-même ».

Raymond Gafner revient d’une séance de travail en groupe lorsque nous nous rencontrons. Il pratique depuis presque dix ans le coaching à travers la formation d’adultes et l’accompagnement de groupes de travail en situation de changement, et voit cette activité comme un « ensemble de pratiques visant à libérer le potentiel individuel et collectif ». « A la base, je suis chimiste. Lorsque j’ai participé à une formation sur la conduite de groupes devant gérer des projets, j’ai été interpellé par l’importance des dynamiques de groupe: elles ont un rôle clef dans n’importe quelle situation. Je me suis découvert des compétences que j’ai voulu développer. ». Dans ce travail sur le potentiel humain résident les trois piliers du coaching: le développement de la conscience de soi, l’estime et la confiance en soi, ainsi que les responsabilités que chacun a dans une fonction. « Souvent, les groupes m’appellent lorsqu’ils s’aperçoivent qu’ils n’arrivent pas à leurs objectifs. Prenons le monde de la recherche scientifique: chaque individu arrive avec sa spécialité et un discours qui va avec. Comment établir un dialogue, se comprendre pour arriver à un but commun? Le coach, peut être un médiateur en cas de conflit. ». Outre les groupes, il arrive à Raymond Gafner de pratiquer du coaching individuel,  toujours lié au monde (complexe) professionnel:  » Les exigences envers un employé sont nombreuses. La liberté d’expression est limitée, les règles d’entreprise très strictes. Et pourtant, pour son bien-être personnel et professionnel, un individu doit sentir qu’il a une marge de manœuvre, des responsabilités et une reconnaissance. Il a besoin d’espace. ». Il arrive au coach et à son client  de devoir travailler sur les croyances et valeurs que ce dernier a pu développer selon ses expériences. Certaines de ces croyances deviennent limitantes et il s’agira d’aller outre ces limites.  » C’est là que le coach se différencie clairement du thérapeute: alors que ce dernier aura un regard et une approche analytiques, le coach travaillera par mise en situation: on ne se penche pas sur le passé, on cherche ce que l’on peut instaurer dans le présent. Je ne pénètre pas dans la vie d’un client, car je n’ai pas besoin de disséquer son passé pour mener mon travail à bien. »

Si les deux coachs ont des champs d’action différents, tous deux ont un but commun: aider les gens à se sortir d’états et de situations paralysantes de manière autonome et efficace. L’efficacité: une des grandes valeurs de notre société contemporaine. Si nous nous inspirions du marathonien qui avant de se préoccuper du 42ème  kilomètre songe au suivant? Peut-être commencerions-nous à comprendre là où l’efficacité fait des ravages et là où elle nous est bénéfique.  
D.S.

Pour plus d’informatio:  www.denisjaccard.ch ou www.meta-for.ch

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