Les méfaits de la Pub

Viviana von Allmen
Duper l’opinion et plier les autorités aux intérêts des grands groupes industriels est un métier qui porte un nom : le lobbying. Ceux-ci se servent des publicitaires pour manipuler le grand public. Et si vous attendez auprès de nos pouvoirs publics et de nos parlementaires pour limiter l’intrusion publicitaire, vous pouvez toujours attendre. Les lobbys, les corporatismes et les marchands du temple ne font pas bon ménage avec la démocratie.
Les agences de communication sont les fondements d’une spirale infernale à la consommation. À mesure que la publicité s’instaure, elle raconte des histoires, édifie le monde corporatif lui-même en tant que participant de l’Histoire, acteur légitime de la culture et citoyen de la société à part entière, son champ d’action s’agrandit non pas seulement pour faire connaître une marque de commerce ou promouvoir un produit, mais pour réécrire l’histoire et modeler les opinions. La publicité ne cesse d’étendre son empire. Nous sommes chaque jour soumis à plus de trois mille messages publicitaires. Jusqu’où ira ce bombardement ? En Suisse, plus de vingt-cinq milliards de francs sont investis par an en publicité – soit 10% de l’endettement de la Confédération! Qu’y a-t-il là de si décisif pour qu’on y consacre tant d’argent, de talent et d’énergie ? C’est que la croissance est indispensable pour entretenir la santé de l’économie. Or, on ne peut produire toujours plus de marchandises sans produire en même temps les envies qui permettent de les écouler. Les publicitaires sont chargés de nous inoculer ces envies. Non seulement on nous somme de participer à la production croissante de marchandises, mais avec la publicité nous sommes tenus d’en assurer l’écoulement, jusqu’à la nausée. Les agences de communication expliquent que le système publicitaire est indispensable à l’expansion du consumérisme et du productivisme. Mais elles ne soucient pas des conséquences catastrophiques pour les hommes comme pour la nature. La publicité est le carburant idéologique de ce saccage : elle nous incite sans cesse à consommer tout en nous aveuglant sur les conséquences de cette hyperconsommation. Il ne faut donc pas en rester à une critique moralisante des « excès » de la publicité. Il faut plutôt s’attacher à comprendre comment elle diffuse un mode de vie qui contribue à l’appauvrissement de la vie. Les excès si décriés apparaîtront alors sous leur jour véritable : les dernières percées d’une offensive qui, depuis trop longtemps, participe à la dévastation du monde.

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