Morges by Night ; marché nocturne

Promenade le long de la Grande Rue par une soirée aventesque.
Visitons les marchés nocturnes, ces dernières possibilités d’acheter cadeaux artisanaux et vin chaud. Les jours vont s’allonger, mais d’ici là profitons de nous réapproprier nos cités de nuit malgré le froid qui nous en a éloignés.
par Lucie Crisinel

La vieille ville de Morges est traversée par une rue piétonne et pavée, la Grande Rue. S’y tient tout au long de l’année les marchés du mercredi et du samedi matin. En ces jours de fêtes, les nocturnes y prennent leurs quartiers dès la fin de journée et jusqu’à 22 heures pour les plus téméraires.
Donc commençons par le commencement, l’entrée dans la rue par le côté temple. D’abord les bruits des personnes m’atteignent, les pas, les paroles, les cris des enfants qui, une fois n’est pas coutume fin décembre, ont le droit de veiller avec les parents et leurs amis. Puis en s’approchant, les odeurs, ces divines senteurs qui rappellent un foyer chaud, la cannelle, l’anis, l’orange, la mandarine, les marrons chauds. Et enfin c’est le sens de la vue qui trouve son compte. Les étals se distinguent les uns des autres, on peut repérer le marchand d’épices, la vendeuses d’habits laineux, chauds et confortables.
Tout cela est éclairé de spots violents, qui nous rappellent que malgré la nuit régnant alentours, il n’est point temps de se laisser aller à la torpeur. Ailleurs ce sont les douces lueurs des bougies faites à la main qui illuminent le stand de leurs camaïeux pastels. Ou encore ces lampes d’ailleurs, fait de matériaux qui ont grandi sous un soleil ininterrompu et qui tentent d’en restituer une partie à nous, gens du « Nord ».
Puis à nouveau c’est l’ouïe dont on recherche l’attention. Un jeune homme chante doucement près de son orgue de barbarie. Est-ce une chanson triste ? Difficile à dire, le son flûté de son instrument, rappelant les fêtes foraines filmographiques, couvre hélas sa timide voix. Touchée comme je peux l’être par tant de choses en ces périodes festives, je lui laisse ma menue monnaie. Il me remercie et m’assure, lui-même plus assuré, qu’elle est destinée à une bonne cause, ce dont nul ne doutait.
Plus loin une autre population attire mon attention, les 9e année vendant le fruit des efforts de leur(e)s parent(e)s aux passants. La technique : deux ados s’avancent au milieu de la rue et achalandent le badaud de leurs biscuits et caramels, leur déclamant les merveilles de l’endroit où ils ont programmés leurs voyages. Rares sont les ingrats n’achetant pas symboliquement ne serait-ce que le stylo emblème de ce futur et mémorable voyage. Votre dévouée non plus n’y coupa pas, émue à nouveau par les souvenirs émergeant de cette rencontre.
Enfin, l’appel du vin chaud se fait pressant. Les doigts sont gourds malgré les gants, et la cigarette ne peut les réchauffer. Déjà deux chaudrons vides de croisés, diantre qu’il faut être rapide pour avoir l’honneur de bénéficier de ce doux breuvage ! La queue s’étend devant ce qui semble être la dernière marmite de la rue à contenir le nectar. Je manque de courage en voyant cet homme vénérable se pencher plus que de raison dans l’antre de cuivre pour en remonter péniblement une demi tasse encore fumante… Tant pis, ça sera pour une prochaine fois !
Dépitée, mais si peu, je me rabats sur les mets chauds de la boulangerie dont je savoure régulièrement la mini pizza reconstituante. Et la manger dans ce contexte enténébré est une nouveauté qui est à réitérer. Mais déjà les camionnettes se fraient un passage parmi les passants plus rares, moins causants. Il est l’heure de se rentrer, on a été braves, on a tenu tête à l’hiver, le retour au coin du feu (imaginaire) est mérité.
A l’année prochaine…

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