L’Au-Delà sur Grand Ecran

Les sociétés modernes laissent de moins en moins de place aux questions existentielles des hommes. Seuls artistes et philosophes prennent encore le temps de s’interroger et de réfléchir aux grandes valeurs de la vie. L’une des expressions de ces préoccupations est le cinéma, un moyen de communication des plus répandus car il touche une large partie de la population, indépendamment du milieu social ou culturel. De plus, un film est un produit fini, prêt à la consommation et ne demande aucun effort de création de la part du spectateur. Dans l’éventail des préoccupations existentielles de l’homme présentées par le cinéma, la question de la mort et de ce qui lui succède dispose d’une place importante. Car il s’agit là de l’élément fondamental de toute culture, comme l’exprime Edgar Morin dans son ouvrage “ l’Homme et la mort “. Le souci des morts, marqué par l’apparition de sépultures, est, en effet, selon lui, la véritable preuve du passage de l’état d’animal à celui d’homme. La science s’emploie de plus en plus à nier la mort, que ce soit par la médecine et l’hyperasceptisation de notre environnement ou par la chirurgie esthétique qui retarde les effets du vieillissement. Ce fait implique une déresponsabilisation de l’homme face à sa propre évolution et une occultation du problème de la réalité de la mort.
La force du cinéma dit « paranormal » (qui traite de la mort et de ce qui lui succède) est qu’il propose une illustration des questions existentielles que se pose tout homme et qu’il y apporte des suggestions de réponses, tout en restant dans le domaine fictif. Cela permet au spectateur d’extérioriser ses angoisses ou ses fantasmes en s’identifiant aux personnages présentés, il les vit donc par procuration, ce qui lui garantit une sécurité totale. Le cinéma est donc le moyen de se rassurer. L’homme aime se faire peur au cinéma car d’une certaine manière il se sent protégé. En effet, tout en étant plongé dans le film, il sait pertinemment que ce n’est pas la réalité. Ainsi le 7ème art serait le seul moyen pour l’homme de vivre ses peurs sans prendre de risques et de les extérioriser. En en faisant l’expérience par procuration, il se libérera d’affects longtemps refoulés dans le subconscient. Ce processus correspond au phénomène de catharsis.
Dans la société actuelle, où la rationalité est de mise, le besoin de transcendance de l’homme est repoussé loin des préoccupations publiques de la communauté et ne peut plus s’épanouir que dans la sphère privée. Cet état de fait à donné naissance à ce qu’Etienne Barilier nomme “le nouvel obscurantisme“ dans son livre “Contre le nouvel obscurantisme“. C’est d’ailleurs de ce mouvement que découlent les sectes modernes, comme le Mouvement Raëlien ou les Enfants de Satan, qui répondent au besoin mystique de l’individu qui ne trouve plus de quoi se satisfaire ni dans la vie communautaire publique, ni en lui-même.  Ainsi, jusque dans le désir légitime de se relier au mystique que nous partageons tous, nous sommes destinés à l’individualisation radicale et voués ainsi à une éternelle solitude.
Zoé Decker

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