Actualité

C’est grave docteur ? Je souffre… du syndrome de l’étudiant.

Si vous n’avez jamais entendu parler de la procrastination académique, ou syndrome de l’étudiant pour les intimes, vous pouvez certainement vous vanter d’avoir déjà révisé un travail écrit la veille au soir, d’avoir préparé un exposé avec l’aide de Wikipédia pas plus de 24 heures avant votre présentation, ou du moins d’avoir repoussé des jours, voire des semaines ou des mois, un devoir qui aurait pu se régler sans tarder. Bienvenue au club.

Oui, nous sommes de nombreux contaminés, et c’est un peu comme une grippe qui s’installe en même temps que la bise hivernale. Reniflements ou gorge douloureuse : Un tas de petits signes qui passent inaperçus lorsqu’ils ne s’accumulent pas, mais qui en disent long. Dans le cas qui nous intéresse, les symptômes s’appellent liste de choses à faire, Dr House ce soir et Jepeuxlefairedemain, et le verdict tombe, impassible : Procrastination. Un mot qui, en le prononçant, fait un peu mal au fond de la gorge lui aussi. Un mot étrange aux sonorités désagréables qui semble tout droit sorti de la bouche d’un médecin jargonnant, comme un virus indomptable. Apprivoisons la bête à ses racines : du latin pro – (adverbe impliquant un mouvement en avant) + crastinare de cras (demain) et crastinus (qui appartient à demain).
Si la procrastination touche un certain nombre de personnes, tant dans le domaine du travail, des tâches domestiques, des soins personnels, des relations humaines que des finances, elle a tout de même un terrain de prédilection. J’ai nommé, les études. Plus particulièrement, les étudiants, dont la moitié se plaint de reporter inutilement à plus tard certaines tâches ou activités. D’où le petit nom « syndrome de l’étudiant ».
Si les causes d’un refroidissement se trouvent dans les courants d’air d’une journée hivernale ou la proximité d’une personne contagieuse, celles du syndrome de l’étudiant seront plutôt l’anxiété de l’évaluation, le perfectionnisme, le refus des exigences d’autrui et le manque d’intérêt, l’incertitude et la difficulté à prendre des décisions, la crainte de l’inconnu ou encore, simplement, l’évitement de situations ennuyeuses. Des réactions certainement fondées, entre autres, dans cette pression sociale de réussir sa vie et de saisir la chance que nous avons de pouvoir étudier. Une pression pas toujours bien vécue, ni réalisée, posée par la société, la famille, soi-même, ou tous ces autres qui semblent réussir si bien, si facilement. Pression à laquelle on échappe en douce le temps de feuilleter le catalogue d’Ikea au lieu de préparer la présentation orale avec laquelle on a rendez-vous dans 3 jours.
Le réconfort de remettre une chose désagréable au lendemain apparaît instantanément, mais l’efficacité du remède-miracle se révèle être de courte durée, et laisse comme un arrière-goût de culpabilité. L’opération aboutit sur le stress d’effectuer sa tâche à la dernière minute, éventuellement couronné de nuits blanches et compagnie, ou l’abandon pur et simple, qui provoque un nouveau soulagement, au goût amer cette fois-ci, et vous-pouvez-disposer-merci. Se débarrasser de ce syndrome qui vous colle à la semelle comme un chewing-gum trop mâché nécessitera du temps, de l’investissement et de l’organisation, trois mots que certains peineront à ajouter à leur dictionnaire, mais avec qui on est sûr de former une équipe gagnante. En commençant par exemple par identifier ses priorités. Non, cette BD ne doit pas être impérativement lue pour demain. Le chapitre de compta, si.
I.Sch.

Édito

La procrastination, un phénomène qui touche surtout les étudiants…

par Alexandre Steudler
Voilà un drôle de mot que vous n’avez peut-être jamais entendu mais qui vous a sûrement déjà touché à un moment donné de votre parcours académique. En effet, cette « tendance pathologique à tout remettre à plus tard» concerne le plus souvent les étudiants.
C’est une expérience que tous les étudiants ont déjà vécue au moins une fois. En se levant de bonne heure le dimanche matin pour cause de mauvaise conscience, on se dit : «Bon cette fois, je m’y mets!» Oui mais voilà, le problème c’est que ça fait déjà trois semaines qu’on se dit qu’il faut s’y mettre et d’un autre côté, il y a la poussière à faire, le bureau à ranger, la télé à regarder… enfin bref, tout sauf «Ça!» ,pour reprendre le fameux terme du romancier Stephen King.
«Ça!», c’est le travail à rendre, l’examen à répéter ou encore l’exposé à préparer, avec une échéance qui ne cesse de se rapprocher doucement, mais sûrement. Alors pourquoi sommes-nous sujet à ce drôle de comportement? Quels sont les mécanismes sous-jacents qui nous poussent à nous conduire de la sorte? Et surtout, est-ce un phénomène récent ou concernait-il déjà les étudiants du siècle passé?
Selon la plupart des théories, la procrastination serait un effet dû à la peur de l’échec. De ce fait, plus la pression exercée sur l’étudiant par les proches et les professeurs serait grande, plus il serait sujet à la procrastination. Pour ma part, même si je me doute que mes parents ont certaines attentes concernant ma réussite, je ne ressens pas de grosse pression concernant mes études. Cependant, ça ne m’empêche pas de repousser sans cesse le début du travail à effectuer, allant même jusqu’à rendre des travaux hors des délais (faute avouée à moitié pardonnée).
Alors on peut se demander si ce syndrome n’est pas le résultat de nos sociétés contemporaines? Comme on peut le voir, nos sociétés ont tendance à vouloir travailler toujours moins pour gagner toujours plus. Au point que, lorsqu’on explique que la retraite en France passera de 60 à 62 ans (65 à 67 selon les situations) des millions de personnes se mobilisent et une sorte de «deuxième révolution française» éclate.
On constate donc aisément que nous sommes passés d’une «société de travail» résultante des mauvaises conditions de vie et des salaires misérables qui ne permettaient guère autre chose que de manger, à une «société de loisirs» où le temps libre est primordial et l’argent nécessaire pour financer les diverses activités. Pour caricaturer, on pourrait dire qu’avant on travaillait pour se nourrir alors qu’aujourd’hui, on travaille pour se faire plaisir.
Dans cet ordre d’idée, nous sommes donc assaillit par une multitude de loisirs divers et variés, qui augmentent notre tendance à trouver le travail académique rébarbatif et ennuyeux. Cela nous amène donc à repousser les «mauvais moments» à passer pour réaliser un travail, au profit des «bons moments» passés à s’amuser. Ce qui ne signifie pas que nous ne travaillons pas, mais nous travaillons le plus tard possible, augmentant ainsi la pression et le stress au moment de fournir l’effort demandé. Cette tension ainsi installée peut s’avérer bénéfique pour certains et néfaste pour d’autres.
Pour conclure, je dirais que la procrastination n’est pas dramatique en soi. Certes, elle a peut-être mené certains étudiants à l’échec. Cependant, il me semble que pour la plupart des gens, elle est un moyen de travailler sous pression, afin de fournir un meilleur travail, tout en profitant au maximum du temps libre à disposition. On pourrait donc dire que la procrastination n’est qu’un effet de l’adaptation des habitudes de travail, à la société dans laquelle nous vivons. Mesdames et Messieurs les professeurs, je vous invite donc à raccourcir les délais que vous avez l’habitude de donner pour rendre les travaux, afin de diminuer le nombre de procrastinateurs!