Spectacles

Un choix empoisonné

Muriel Chiffelle
Du 16 au 23 novembre à la salle de spectacles de la Cité Universitaire, le THUNE (Théâtre Universitaire Neuchâtelois) présentait « Peanuts » une pièce théâtrale savoureuse signée Fausto Paravidino, mise en scène par Alain Borek et magnifiquement interprétée par les jeunes talents de la troupe. Retour sur une première représentation réussie.

Les spectateurs sont accueillis par une musique légère mais pétillante, répandant sa mélodie tout au long de la présentation des protagonistes de l’histoire qui se retrouvent réunis à la façon d’une photo de famille. Le personnage principal, Buddy, s’en retrouve  presque étouffé derrière tous ses congénères. Ce prélude s’annonce énonciateur de ce qui va se passer  par la suite.
Chargé de surveiller seul un appartement qui n’est pas à lui, Buddy se retrouve vite confronté  à une situation délicate : il s’agit pour lui de gérer un groupe d’amis venu s’installer dans l’appartement. La tâche ne va pas se révéler évidente et les ennuis vont s’additionner. Malgré une présence envahissante et une bonne foi apparente, les amis de Buddy ne vont pas lui être d’un grand secours et ce dernier va se retrouver  assez seul pour gérer la situation. Dépité, il va encore devoir affronter les reproches sévères du fils des propriétaires de l’appartement à l’arrivée de celui-ci. De plus, Buddy va se retrouver confronté à un ordre qui pourrait bien tout changer : chasser ses amis de l’appartement. Docile, il accepte.
Un bond de dix ans dans le futur amène alors les spectateurs dans un tout autre univers, froid, sombre et austère. Un monde carcéral se dessine alors, dans lequel les spectateurs découvrent des gardiens distants et froids ainsi que des prisonniers dont l’état de santé est préoccupant, mais dont les gardiens ne semblent pas se soucier. C’est qu’ils doivent veiller à la démocratie afin de la protéger de la menace que représentent ces opposants prisonniers. Une menace qui va se révéler être un problème lorsqu’un des prisonniers est retrouvé mort faute de soins suffisants.
Parmi ces gardiens se trouve Buddy et les prisonniers qu’il côtoie tous les jours ne sont autres que quelques-uns de ses anciens amis. Les années ont passé et Buddy se demande comment la situation aurait évolué s’il avait refusé de chasser ses amis de l’appartement dix ans plus tôt. S’il avait eu le courage de s’opposer, de refuser, les circonstances auraient pu être différentes et le fils des propriétaires se serait retrouvé impuissant.
Remplie d’humour, frais et actuel, cette pièce propose un regard sensible sur la société d’aujourd’hui, ainsi que les choix personnels de chaque être humain et plus particulièrement sur la démocratie. Le spectateur se sent transporté  par des sensations variées et un jeu d’acteur saisissant de réalisme issu d’une mise en scène subtile mais efficace. Les messages que le spectateur peut identifier, se révèlent simples mais jamais moralisateurs, ne fournissant pas distinctement un jugement en noir ou blanc, mais en laissant une vraie liberté d’interprétation. La pièce est à peine terminée qu’un lot de pensées défile dans notre tête. Parmi elles, la réflexion suivante parvient  à notre esprit : après tout, cette bande de copains aurait très bien pu être la nôtre !

Evénements

MIKU HATSUNE: UNE VÉRITABLE STAR 2.0

Alors que nous croyons encore naïvement qu’il existe une frontière nette entre réalité et fiction, les japonais, eux,  ont su s’adapter au nouveau paradigme du 21e siècle. Toujours à la pointe, ils ont en effet une nouvelle star dans leur panthéon : Miku Hatsune. Sa spécificité ? Ni sa taille de rêve, ni sa mirobolante chevelure turquoise – quoi qu’un peu déconcertante ! – non, ce qui fascine réellement c’est que cette fillette de 16 ans … n’existe pas !

1m58, 42 kilos, un poireau sous le bras et un micro dans la main, Miku Hatsune est devenue en deux ans une véritable icône de la culture pop japonaise. Actuellement en tournée dans son pays natal, ses concerts live ravissent les foules. Et pourtant, cette star est une pure création technique, associant voix de synthèse et corps holographique. Vous trouvez cela curieux ? Parfait.

Miku Hatsune, littéralement « premier son du futur » en japonais, est créée en 2007 par Crypton Futur Media dans le but d’assurer la promotion d’un nouveau logiciel informatique, Vocaloid 2, permettant aux utilisateurs de faire chanter des paroles par des voix artificielles. Jusqu’ici, rien d’extraordinaire. Mais très vite, de nombreux internautes commencent à partager  leurs créations sur le net, provoquant un engouement inattendu. Remix de chansons populaires, vidéoclips, animations 3D, parodies… En quelques mois, on ne compte plus les sites et les vidéos reprenant le personnage de la petite Miku.

Prenant conscience de cette notoriété croissante, le designer de Miku Hatsune saute sur l’occasion et publie une série de mangas (i.e. BD japonaises) centrés sur son personnage. Puis, début 2008, la créature débarque sur les écrans en apparaissant dans plusieurs animations bien connues du grand public. Les frontières du World Wide Web dépassées, rien ne peut plus arrêter la propagation du phénomène qui prend des proportions inégalées… Si bien que tout le monde s’y met !

En 2009, une pétition circule qui permet à Miku Hatsune de figurer sur 3 des 90 plaques en aluminium greffées à Akatsuki, une sonde spatiale en partance pour Vénus. L’année suivante, un politicien désireux de rejoindre la Chambre Haute de la Diète japonaise ira même jusqu’à fonder sa campagne sur un projet de loi visant à sécuriser l’utilisation de l’image de l’idole, espérant ainsi rallier les jeunes à sa cause. Sans oublier Playstation et son jeu « Miku Hatsune – Project Diva », dont le principe est simple: permettre aux fans de s’immiscer dans l’univers de la star en la faisant chanter, danser ou en choisissant sa garde-robe.
Mais tout cela n’est rien comparé au dernier tour de force des créateurs de Miku. Le 9 mars 2010, devant des millions de fans déchaînés, Miku donne son premier concert live… Dans un corps en hologramme 3D !

Aujourd’hui, avec des milliers de CD vendus et tout autant de produits dérivés, le phénomène Miku n’est pas prêt de se tarir. Cette incroyable histoire suscite pourtant certaines interrogations : sommes-nous en train de troquer la réalité pour une douce fiction ? Je ne saurais y répondre. Mais une chose est sûre… Ils sont tout de même forts ces japonais !
L.L.
Pour une vidéo de Miku Hatsune en live, voir : http://www.youtube.com/watch?v=DTXO7KGHtjI