Retrospective

Pitoyable confession!

 

Franchement George, je ne t’aime pas. Non, tu as bien entendu, je ne t’aime vraiment pas. Tu es la base de tout. Qu’espérais-tu ? Ou plutôt qu’espériez-vous, toi et tes amis ? Vous êtes des nuisances. Je ne me calmerai pas ! Vous avez gâché ma carrière !  Tu ne me crois pas… Tu demanderas à tes disciples, peut être que tu comprendras mieux.

J’étais le plus performant, le plus doué, le plus à même d’occuper tout poste à responsabilité. Evidemment que tout allait bien les premiers mois, sans compter sur un curriculum vitae en platine. Bien entendu, il y avait de la concurrence, mais il n’y avait rien de plus sain que celle-ci. En somme, ma vie professionnelle ne pouvait mieux démarrer.  Je ne m’attendais à ce que tout change avec une telle rapidité.

Un jeune homme se présenta un matin. Il se disait chirurgien et commençait sa première semaine aux Urgences. Il n’était pas meilleur que moi, ni plus serein. Cependant, il avait un atout, l’atout qui deviendra la référence sur laquelle on nous jugera dorénavant. Il était beau !

Je ne suis pas le plus laid de l’établissement, mais je me dois d’être honnête : je ne suis pas le plus attrayant des hommes. Jusque là, tout allait pour le mieux, je n’étais qu’un brillant médecin sans relation sentimentale, physique, ou d’un autre genre. Pourtant j’étais heureux. C’était sans compter sur son arrivée, George, ton arrivée ! Dès lors, je me suis petit à petit embourbé dans ce néant que constitue ton ombre. Avec ton air tristement sérieux, tes yeux rieurs, ton attitude faussement désinvolte, tu m’as littéralement déclassé. Les capacités du grand brun ténébreux ne rivalisaient probablement pas avec celles du petit grassouillet au visage ingrat, seulement les compétences ne serviraient plus à juger la qualité du médecin. Le nombre de relations, plus ou moins tumultueuses, que nous autres, mécaniciens du corps humain, aurions au cours d’une saison : voilà la nouvelle référence. Pourtant, et j’en suis pleinement conscient, tu n’es pas le pire de tous.

En m’exilant au Seattle Grace Hospital, je pris conscience que, en fin de compte, la médecine t’intéressait. Ce n’était pas le cas de ta descendance. La bande à Shepherd et Grey n’a pas hérité de ton professionnalisme. Une bande de jeunes, à l’insolente réussite, tant bien médicale que relationnelle, est apparue. Elle a tout emporté sur son passage. Plus personne ne faisait attention à moi. J’ai été renvoyé peu après leur fracassante arrivée, en raison d’un manque d’abdominaux et de sex-appeal…

J’ai tenté vainement de relancer ma carrière en m’exilant à la campagne, mais je me suis retrouvé dans une parodie de village mormon. Un certain docteur Quinn, femme médecin, luttait pour l’émancipation des femmes et l’égalité des peuples. Il ne m’en a pas fallu d’avantage pour fuir cette ambiance faussement idéaliste, surtout que les conditions de vies étaient plus que précaires. Ma solution fut, sans hésitation, la fuite.

Le comble de cette pitoyable histoire, c’est que je me retrouve de nouveau confronté à mon bourreau originel, bien que tu fusses le plus humain de tous mes adversaires. Tu étais médecin, tu l’es probablement encore dans une de ces chaînes à petit budget du Tiers-monde. Moi, je n’ai été que l’élément inutile que l’on remarque à retardement. Tout ceci pour te dire que j’accepte cette réalité : un médecin à la télé ne doit pas être performant, il doit être charmant. C’est à se demander comment le docteur House s’en est sorti…

PaSaGui

Analyse

À la rencontre des indignés suisses!

 

Les suisses s’indignent

Du printemps arabe aux manifestations des indignés en passant par les émeutes criminelles de Londres, l’année 2011 a été un millésime à la fois savoureux et amer d’union et de rébellion. Qu’elle soit opposée à un dictateur ou à un système économique, qu’elle soit armée ou pacifiste, nationale ou universelle, l’union peut faire une différence. Elle peut avoir des impacts très concrets, comme la mise en place d’un nouveau gouvernement en Egypte ou en Tunisie, mais peut surtout être le moteur d’une prise de conscience. Le mouvement des « indignerons » espagnols l’a prouvé en aboutissant à un phénomène international avec comme point d’orgue la journée du 15 octobre 2011 qui a réuni 81 pays et plus de 900 villes.

En Suisse, le mouvement du 15 octobre a été suivi à Zurich et à Genève. Ces mouvements d’indignés suisses récemment médiatisés existent pourtant depuis bien plus longtemps. Au mois de juin déjà, des indignés ont commencé à se rassembler sur internet et ont organisé quelques assemblées et mobilisations. N’étant pas assez nombreux, les mouvements se sont essoufflés pendant l’été. C’est avec l’ascension du mouvement « Occupy Wall Street » en septembre que les mouvements suisses se sont réveillés et ont décidé de faire partie des pays participant à l’appel à la mobilisation le 15 octobre 2011.

300 manifestants à Genève

Ils étaient plus de 300 à manifester à la symbolique Place des Nations à Genève. De nombreuses personnes se sont succédé au micro devant une foule attentive et ravie de voir un si bel exemple de liberté d’expression. Qui étaient ces orateurs ? Tout simplement des gens trop souvent témoins d’injustices en Suisse et dans le monde. La diversité des manifestants était remarquable. Qu’ils soient étudiants ou mères de famille, chiliens, iraniens ou suisses, qu’ils parlent anglais, espagnol ou français, tous étaient solidaires malgré leurs différences. « C’est notre devoir de nous indigner parce que nous, on le peut. » affirme un manifestant. En effet, ils étaient beaucoup à soutenir des causes internationales et les difficultés économiques des pays tels que le Chili, l’Espagne ou la Grèce.

Si ces pays ont des problèmes concrets, il est plus difficile d’en trouver pour la Suisse qui a moins souffert de la crise. Mais « dans notre pays, il y a aussi des pauvres et ça coûte cher de vivre dans un pays riche. » rappelle un orateur. A une semaine des élections fédérales, l’importance d’aller voter a aussi été soulignée. Les changements passent par des lois et le taux d’abstentionnisme est trop élevé pour un pays qui a la chance d’être démocratique. Cependant, le mouvement se dit apolitique. Et « si les partis politiques veulent soutenir le mouvement, qu’ils le soutiennent mais qu’ils ne se le réapproprient pas » déclare un indigné de la première heure. Puis il ajoute qu’il est « important de voter contre l’UDC, mais surtout de voter pour des valeurs que défendent les partis». Être apolitique et demander à voter contre un parti est tout de même contradictoire.

Des thèmes très variés ont été abordés mais l’ennemi commun des indignés reste le système capitaliste actuel. « The global economy is about to crash » chante un indigné sur un air reggae fédérateur. « Il faut placer l’homme avant la finance » déclare un jeune étudiant alors qu’une retraitée rappelle qu’il ne suffit pas de supprimer le système actuel, il faut « trouver avec quoi le remplacer ». C’est bien là le problème, s’indigner c’est bien, mais encore faut-il trouver des solutions.

Une indignation disciplinée!

A 15 heures, une organisatrice met fin à la manifestation, ils n’ont pas obtenu le droit de la prolonger plus longtemps. La liberté d’expression a peut-être ses limites en Suisse… Quoi qu’il en soit, des groupes de paroles se sont réunis dont celui du mouvement des indignés de Genève. Certains se connaissaient déjà par internet et étaient ravis de pouvoir parler face à face. Les problèmes principaux de la réunion étaient de trouver des moyens de rendre le mouvement visible et trouver des buts concrets. L’idée des Systèmes d’Echange Locaux, un système local dans lequel on échange des services non pas contre de l’argent mais contre d’autres services, a séduit bon nombre d’indignés. A la fin de la journée, une décision est votée à main levée : ils camperont la nuit au parc des Bastions devant le Mur des Réformateurs. Une semaine plus tard, une trentaine de tentes sont toujours plantées et les indignés encore présents. Chaque soir se tient une assemblée générale afin d’organiser au mieux un mouvement sans hiérarchie, ni chef, ni porte-parole.

Le mouvement va-t-il durer ? Aura-t-il un impact politique ? Rien n’est moins sûr, mais après les émeutes de Zurich en septembre, il est bon de voir une rébellion pacifiste et solidaire. Et puis surtout, 3 ans après le début de la crise économique, il était temps que la Suisse s’indigne contre un système capitaliste loin d’être parfait.

SR