Analyse

Automutilation : La souffrance en point de mire

Automutilation : Une violence envers soi-même

Lorsque l’on parle de violence, les images qui nous viennent en général à l’esprit mettent en scène plusieurs individus. Il est bien plus rare de penser directement à une seule  personne retournant  la violence contre elle-même. Et pourtant ce cas de figure est bien plus répandu qu’on ne le pense. Ce que l’on nomme « automutilation » touche en effet  de nombreux jeunes chaque année.

Mais qu’est donc vraiment ? Cette forme de violence est tout d’abord d’ordre personnel. Elle se produit donc envers l’individu lui-même et non envers autrui. La personne se mutile le corps, le plus souvent les avant-bras en s’affligeant des violences de toutes sortes. Cela peut être des coupures, des morsures, des cognements contre les murs ou encore des  brûlures.

Si l’on en croit les sites abordant le sujet, les causes de l’automutilation sont nombreuses et demeurent inhérentes à chaque personne. Néanmoins, il est possible d’en lister les plus fréquentes. Selon le site internet The Royal College of Psychiatrists, une personne qui se mutile est en général « dans un état fortement émotionnel, en détresse, et souffrant d’une perturbation intérieure insupportable ». Les causes de ce mal être  peuvent venir d’abus physiques ou sexuels subis durant l’enfance, d’une mauvaise image de soi-même ou encore d’un problème relationnel important avec son entourage par exemple. De plus, l’automutilation peut être le symptôme d’une personnalité borderline, d’un trouble bipolaire ou de phobies. Il est important de souligner que les personnes s’automutilant ne sont pas nécessairement atteintes d’une maladie mentale. Ce qui ne réduit en rien la gravité de cet acte dont la « victime »doit bien souvent être hospitalisé. Toutefois, les personnes pratiquant cette violence envers elles-mêmes ne sont pas toutes suicidaires.

Touchant principalement les adolescents et les jeunes adultes, l’automutilation peut survenir à tout âge de la vie, mais reste heureusement rare chez les enfants. Selon The Royal College of Psychiatrists, 1  jeune sur 10 s’automutile et cette forme de violence est plus courante chez les femmes que chez les hommes. Les spécialistes notent également le fait que cette pratique est un acte dont les jeunes ne parlent pas facilement, rechignant à se confier à leur entourage.

Les thérapies proposées aux patients souffrant d’automutilation dépendent bien évidemment de la cause de l’acte de violence. Selon les situations, une thérapie cognitive sera proposée ou des antidépresseurs seront prescrits. Toutefois,  il n’est pas toujours évident de sortir d’une telle violence envers soi-même. Les thérapeutes l’ont bien compris, et à l’image du Royal College of Psychiatrists, préconisent d’autres méthodes pour parvenir à éviter l’acte de mutilation. Il est par exemple conseillé de se changer les idées, en lisant ou en faisant du sport lorsque l’on sent que l’on va passer à l’acte. Et si « l’envie » de se faire du mal devient trop forte, pourquoi ne pas s’affliger une douleur bégnine telle qu’une douche froide ?
Enfin, il reste encore les forums sur lesquels les jeunes peuvent s’exprimer, confier leur peurs et commencer à demander de l’aide. Le premier pas est toujours le plus dur, mais il est nécessaire pour avancer sur le chemin de la guérison.
M.Ch

Evénéments

« L’éducation, source de nos violences ? »

 

Pour ce premier café scientifique de l’année 2012, les organisateurs du débat ont décidé de remonter « aux sources du mal » selon les termes du modérateur Vincent Costet, soit, aux sources de nos violences, en s’interrogeant sur le rôle que joue l’éducation dans le développement de celles-ci.
Notre éducation est-elle le produit d’un système judiciaire répressif ? Peut-on mettre la faute sur le système ? Où sont les limites de la violence ?

La question de la « petite fessée » aura été récurrente au long de la discussion. Estelle de Luze, avocate qui s’est intéressée au droit de correction dans le cadre de sa thèse de doctorat, situe le débat au niveau juridique et rappelle qu’il n’y a plus de droit de correction prévu pour les parents. Aujourd’hui, ce droit est reconnu par la jurisprudence : si un acte violent est commis avec reprise, il est punissable. Dans le cas d’un acte isolé, la punition du parent dépend de la plainte éventuelle de l’enfant.
Le professeur Suzette Sandoz, directrice de thèse d’Estelle de Luze, admet avec le sourire ne pas avoir été toujours « sur la même longueur d’onde » que cette dernière. Elle  évoque par la suite la « petite fessée » et est d’avis qu’elle n’est pas un mal dans les cas rares qui l’exigent.

Pour tenter de définir les limites à ne pas dépasser, René Knüsel, politologue, sociologue et directeur de l’Observatoire de la maltraitance envers les enfants, revient d’abord sur le fait que la violence est un domaine vaste. Il souligne que certaines formes de violence sont admises de façon courante dans notre société. La violence n’est pas seulement physique, bien que ce type de violence monopolise l’attention. Par exemple, la violence au sein d’une famille peut déjà être dirigée contre l’enfant même si elle n’a lieu qu’entre les conjoints.
Les limites sont toutefois complexes à établir. En effet, comment construit-on une preuve de violence ? Elever la voix, est-ce de la violence ? Traiter un enfant de « bon à rien » n’est-ce pas plus violent que de lui donner une « petite fessée » ?

Opposé à toutes formes de violence, André Kuhn, professeur de criminologie et de droit pénal à l’université de Neuchâtel, soutient que la violence n’est jamais tolérable. En effet, elle est une sanction qu’on afflige à l’autre parce qu’on veut récupérer l’autorité qu’on pense avoir perdue, qu’on afflige à l’autre pour soi-même et pas pour le bien de l’autre. A cela, René Knüsel ajoute que le recours à la violence est l’aveux de la perte de pouvoir, qu’il intervient quand les parents n’ont pas les moyens de faire faire à l’enfant ce qu’il faut, d’être des éducateurs conformes aux critères de la socitété.

Estimant que la violence dans l’éducation est propre à créer les violences de demain, le point de vue de André Kuhn est que plus l’enfant aura fait l’expérience de différents modes de résolutions des conflits, plus il aura de moyens en sa possession pour résoudre ses propres conflits. La solution serait alors d’expliquer à l’enfant, dès le plus jeune âge, ce qu’il ne faut pas faire et ce qu’il convient de faire, mais on ne devrait pas imposer ce qu’il est bon de faire ou non par une sanction.

Quels sont les effets de la violence dans l’éducation ? A ce jour, cette question n’a pas été résolue. Le lien est certes de mieux en mieux établi entre les situations vécues dans l’enfance et le comportement de l’individu au long de la vie mais il est difficile d’établir des liens systématiques de causalité et de conséquence exacts des effets de la violence. De plus, la diversité des caractères des enfants entre en ligne de compte : renfermement sur soi-même, violence ou encore addcition sont autant d’effets possibles. On est loin de parvenir à un lien de causalité effectif et fort.

La question s’est ensuite orientée vers l’appel à une aide extérieure, que ce soit pour l’éducation au sein de la famille ou pour la gestion de la violence au sein de celle-ci. Les intervenants nous font remarquer qu’en Suède, par exemple, pays où le taux de violence à l’égard des enfants est très peu élevé, le soutien aux familles est important. A cela s’ajoutent des lois qui interdisent toute forme de violence faite aux enfants bien connues de la société.
Sur le même modèle, si une loi prohibant toute forme de violence envers les enfants était indroduite et rendue publique en Suisse, elle pourrait être l’un des moyens de diminution des violences dans l’éducation.

Ce que tous s’accordent à penser, est que la violence ne doit jamais être un moyen éducatif.
L.dA