Les problèmes de chauffage sont monnaie courante dans les bâtiments publics. À Neuchâtel, l’université en fait elle aussi les frais. Pour mieux comprendre les enjeux des rénovations de ces grands édifices, Larticle.ch s’est entretenu avec l’architecte cantonal de Neuchâtel Yves-Olivier Joseph et Michel Gailloud, architecte associé d’un bureau lausannois. Photo: Emma Rebeaud
La situation
Les étudiants de la Faculté des lettres de l’université de Neuchâtel connaissent bien le problème : en hiver, il fait trop froid, alors qu’à l’arrivée des beaux jours, l’air de la cafétéria est à peine respirable. Pourquoi une telle différence ? Pour les deux architectes, le problème vient principalement du vitrage de la grande véranda. Datant de 1984, le verre utilisé est beaucoup moins efficace que celui fabriqué de nos jours. « L’isolation est insuffisante. Le bâtiment est fait de murs doubles, ce qui lui permet de très bien résister aux intempéries. Il est solide mais la résistance du vitrage est faible » explique Michel Gailloud. Pour Yves-Olivier Joseph, c’est normal : « A l’époque de sa construction, cette grande baie vitrée était une nouveauté et représentait une avancée technique. Bien sûr, aujourd’hui les normes ont beaucoup évolué ». Malgré ces soucis de gestion de la température, Yves-Olivier Jospeh affirme ne jamais avoir reçu de revendications à ce sujet. « Les élèves ne restent souvent que trois ans dans ce bâtiment, ils partent avec les problèmes ». Il admet toutefois que toute personne se rendant dans ce bâtiment saisit instantanément le problème.
Un style 80’s
La marque des années 80 est bien ancrée dans le style de ce bâtiment. Du mode de construction aux formes, tout rappelle cette décennie. Michel Gailloud : « Le béton très présent dans cette construction et le mur double sont typiques des années 80. La forme aussi. C’est dans ces années qu’on a commencé à casser les géométries traditionnelles. Malheureusement, dans ce cas, la cassure reste timide. Le bâtiment en ressort très rigide et un peu triste ».
Le groupe d’architectes ayant travaillé sur le projet de l’espace Louis-Agassiz 1 a été sélectionné par un concours d’architecture. Pour l’architecte cantonal, leur choix était avant tout artistique : « La Faculté des Lettres se trouve au bord du lac, les architectes ont pensé que le lieu serait plus agréable et plus profitable s’il était transparent. C’est une sorte de jardin d’hiver. Ce bâtiment est privilégié et les étudiants peuvent profiter d’un cadre magnifique ». Il continue en défendant l’option de la verrière : « Prenez l’exemple du bâtiment de droit, il est très fermé. C’est beaucoup moins agréable. Les architectes ont fait le choix du paysage pour la Faculté des Lettres ».
Quel avenir pour ce genre d’édifice ?
Pour le moment, aucune rénovation n’est envisagée pour le bâtiment des Lettres. « Le patrimoine architectural de Neuchâtel mérite un assainissement, on veut améliorer les conditions d’exploitation de ces lieux. Mais certains bâtiments, comme par exemple le lycée Denis de Rougemont, ont des besoins en rénovations beaucoup plus importants. L’espace Louis- Agassiz est encore sain et n’est pas prioritaire ».
Michel Gailloud, quant à lui, expose les possibles améliorations : une isolation périphérique du bâtiment dans son entier et bien sûr, un changement de vitrage. Il reste cependant lucide : « Des rénovations coûteraient extrêmement cher et je me demande même si le reconstruire entièrement ne serait pas d’un coût équivalent. À mon avis, ce bâtiment n’a plus de valeur ». Le cas de Neuchâtel n’est pas isolé. Les autres cantons suisses rencontrent le même genre de problèmes avec leurs bâtiments publics, comme le canton de Vaud et certains locaux de l’Université de Lausanne.
Pour Yves-Olivier Jospeh, le bâtiment répond aux attentes avec une aula très utilisée, des salles de classe agréables et la possibilité de se détendre au bord du lac. Il ajoute également que l’université compte construire d’autres bâtiments dans le même secteur pour que les étudiants puissent continuer de profiter de la proximité des eaux du lac de Neuchâtel. Dans l’immédiat, il conseille aux étudiants de »mettre un pull en hiver » et de »sortir en été ».
Emma Rebeaud