Le 18 mai 2014, les neuchâtelois devront se prononcer concernant le développement de l’énergie éolienne dans le canton. Mais que cache le développement de cette énergie « verte »? Y a-t-il matière à s’inquiéter pour notre avenir énergétique ou faut-il donner carte blanche au Conseil d’État? Eclairage.
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Le 18 mai prochain, les neuchâtelois se prononceront concernant la suite à donner à l’énergie éolienne dans le canton. Deux possibilités s’offrent à la population neuchâteloise:
– soumettre à votation tous les futurs projets d’implantation d’éoliennes dans le canton ou,
– donner carte blanche aux Conseillers d’État pour établir les différents projets d’implantation dans le canton, en modifiant le décret de 1966 sur la protection des crêtes[1] et en inscrivant dans la loi les différents sites et les nombre d’éoliennes qui y seront affectées.
Retenons que dès le 18 mai, soit le peuple laissera les dirigeants politiques décider de son avenir énergétique, soit il décidera au coup par coup, de l’implantation d’éolienne à tel ou tel endroit. Une décision qui s’annonce donc relativement importante!
La charrue avant les boeufs
Comme souvent, le Conseil d’État n’a pas attendu la voix du peuple pour prendre des décisions, peut-être un peu hâtives. Ainsi, une loi prévoyant l’implantation de 59 éoliennes sur 5 sites différents a déjà été soumise et adoptée par le Grand Conseil… mais c’était sans compter sur l’opposition d’une initiative populaire, qui compte ne pas laisser le champ libre au Conseil d’État, en lui rappelant notamment le décret de 1966.
Arguments pour-contre
Mais y a-t-il vraiment matière à s’inquiéter concernant ces éoliennes? Pourquoi s’opposer à un projet qui nous permettrait de faire un premier pas vers la sortie du nucléaire? L’énergie éolienne est-elle vraiment viable sur le long terme? Penchons-nous un peu plus sur les différents éléments posés dans la balance…
Une forte production d’énergie
Un des arguments avancé par le Conseil d’État est l’efficience des éoliennes… une efficience malheureusement difficile à établir. Selon le spécialiste Jacky Ruste, ingénieur en génie physique de l’Université de Nancy 1, la production d’énergie d’une éolienne est très variable et n’atteint que très rarement sa productivité maximale. Ainsi, le recul pris par rapport aux parcs éoliens français et allemands montre que « l’on dispose d’une puissance garantie (= permanente) de 5 à 7% en moyenne sur l’année[2].» Le rendement maximal ne dépassant que rarement les 70% et de manière épisodique. L’argument selon lequel des éoliennes produisent 75% du temps ne spécifie pas à quel rendement elles le font.
De plus, il faut savoir qu’on ne peut stocker l’énergie électrique (ou difficilement) et que de fait, la production doit être consommée sur le moment ou est alors perdue. Ceci en corrélation avec la consommation électrique d’une journée qui varie beaucoup selon les heures de la journée (absence du foyer). On constate donc que, d’une part, l’électricité produite ne sera pas suffisante pendant les heures « pleines ». Et d’autre part, on produira de l’énergie qui ne sera pas consommée durant les heures « vides », de là à dire qu’on brassera de l’air, il n’y a qu’un pas.
Le problème est, bien sûr, que la production est imprévisible et n’est clairement pas adaptée aux variations de la demande sur une journée et, par projection, sur l’année (plus grande consommation en hiver qu’en été, pas forcément plus de vent…).
Pas d’impact sur le paysage
Cet argument n’en est en fait pas un car l’explication donnée est que les éoliennes peuvent être démontées très facilement. Mais qui irait démonter des éoliennes venant d’être installées et qui auront coûté des millions pour le plaisir de la population mécontente? Ne nous voilons pas la face, les éoliennes vont immanquablement défigurer les crêtes du Jura. On s’en rend compte rien qu’en sachant qu’elles mesurent entre 170 et 200m de hauteur. En comparaison à la Tour Eiffel (324m), c’est plutôt impressionnant, surtout lorsqu’on connait le nombre d’installations prévu.
Et si on parlait d’argent ?
Parmi les principaux promoteurs des installations éoliennes prévues se trouvent le Groupe E, ainsi que les Services Industriel Genevois (SIG). Ceci implique que l’énergie produite par les éoliennes sera en partie distribuée dans des foyers genevois, mais également fribourgeois, ne laissant au final qu’un faible pourcentage de leur fantastique rendement aux neuchâtelois. Les gagnants seront évidemment les promoteurs, qui toucheront des subventions pour compenser le prix plus élevé de l’électricité éolienne!
Sans plus entrer dans les détails, qui sont pourtant nombreux, n’oublions pas, que l’on soit pour ou contre les éoliennes, la votation du 18 mai nous demande de nous prononcer sur le fait de vouloir ou non fonctionner en démocratie. En votant contre l’initiative et pour le contre-projet, nous acceptons de donner les pleins pouvoirs au Conseil d’État et de se résoudre au silence, ce qui est un non-sens dans un pays où la démocratie fait la fierté de ses habitants.
Ceci porte à se poser des questions sur la raison d’être d’une telle votation… l’avis du peuple ne devrait-il pas être systématiquement demandé?
AST
[1] Décret interdisant la construction de bâtiments n’ayant pas un but servant l’économie agricole ou forestière sur les crêtes.
[2] Petit guide pratique de l’énergie éolienne – http://asso.acide89.free.fr/guide_eolien.pdf