Béjart Ballet – Anima Blues au-delà du Sacre du Printemps

Le Béjart Ballet Lausanne a présenté du 18 au 22 décembre 2013 Le Sacre du Printemps, Anima Blues et Le Spectre de la Rose. Trois pièces pour deux heures de représentation, une troupe pour trois chorégraphes : feu Maurice Béjart, Gil Roman et Christophe Garcia. Un voyage au cœur de trois univers différents, voyage durant lequel la danse raconte ses histoires… les nôtres peut-être.

Photo : BBL / Francette Levieux

Le Sacre du Printemps

Le Sacre du Printemps emporte toutes les voix, ou presque, ce dimanche 22 décembre 2013 à Beaulieu. Tableau de l’union entre la femme et l’homme, métaphore de la renaissance printanière et tour de force de l’effet de masse, cette pièce ne laisse pas indifférent, elle percute.

Avec quarante danseurs sur scène, le sentiment d’étouffement n’est pas loin et la musique d’Igor Stravinsky n’apaise pas. Elle est la dernière dans l’ordre de passage, comme on dit le meilleur pour la fin. En effet, tous ces  corps, cet excès de force chez l’homme et de douceur chez la femme, cette structuration abusive du mouvement s’accordent avec ce trop plein d’applaudissements. C’est du Béjart, on ne peut qu’aimer.

Anima Blues

Au néo-classique de Maurice Béjart, certains pourraient préférer le mariage de l’univers du grand chorégraphe avec une idée plus contemporaine, ce qu’a présenté Gil Roman.

Un bordel ordonné. Deux mots pour résumer Anima Blues. Une Audrey Hepburn telle qu’on la connaît dans Breakfast at Tiffany’s : mêmes mimiques, même gestuelle, elle hypnotise. Mêlée au blues de Thierry Hochstätter et jB Meier, sa voix guide le travail de Gil Roman mais ne semble pas atteindre ce danseur au coin de la scène, immobile. Cette longue ballade de blues est la danse de l’Anima en référence aux travaux de Carl Gustav Jung. D’après le chorégraphe, « chaque homme porte en lui une femme et c’est cet élément féminin que j’ai appelé l’Anima. »

Malgré cette mer d’informations avec comme seul fil conducteur Audrey, un ordre sous-jacent semble pourtant bel et bien régler la pièce. C’est ce danseur là-bas au coin de la scène ; un cylindre tourne au-dessus de sa tête déversant de petites plumes. Il fait penser à un sablier. Peut-être est-il le temps qui passe mais immobile ? Ou une conscience observant chacun des actes des danseurs mais ne disant mot ? C’est bien là l’atout majeur d’Anima Blues contrairement au Sacre du Printemps : la place pour l’imagination est grande, bien plus grande.

Le Spectre de la Rose

Reste Le Spectre de la Rose, la première pièce présentée. Une femme parmi des hommes, une âme à la recherche de son âme sœur. La boucle ne semble jamais se boucler ; la danseuse virevolte parmi ces corps masculins, les poursuit et ne s’arrête, plutôt ne se voit arrêtée qu’à la fin de sa danse. A trop rechercher la perfection chez l’homme, à trop jouer avec chacun d’eux, ce que lui réserve le destin, c’est une croix. Suspendue, violée pour ainsi dire, la voilà punie.

Ces histoires, les nôtres, transparaissent clairement dans cette pièce mais dans les deux autres tout autant. Le monde est régi par le temps, cette force immobile, qui ramène très souvent ses acteurs à la case départ. La dichotomie du sexe n’y échappe pas, elle est la première concernée. Il faut peut-être aller bien au-delà d’une telle conclusion mais l’autre attire toujours toute notre attention, ou presque. Non seulement il est un point de repère mais aussi bien flatteur, à tort ou à raison. Et si le monde n’était qu’un Huis Clos immensément grand dans lequel nous finissons toujours par perdre ?

C. 

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