Eclairage

Dix ans de rétrospective avec Le Temps

Pour son dixième anniversaire, le journal genevois Le Temps a publié un cahier spécial1 retraçant les événements marquants depuis 1998. L’occasion de faire un bilan.
Analyse par : Sonia Bernauer

Le 18 mars 1998, la fusion entre le Journal de Genève et Gazette de Lausanne et Le Nouveau Quotidien donnait naissance à un nouveau journal : Le Temps. Dix ans se sont écoulés depuis et à l’occasion de cet anniversaire tout particulier, le quotidien genevois a publié un cahier spécial retraçant les évènements qui ont marqué le monde, l’Europe, la Suisse au cours de cette période. A cette occasion, Le Temps a aussi consacré une partie de son «hors-série» aux réponses aux questions des lecteurs à propos du journal, aux attentes de diverses personnalités à propos des médias et à des interrogations sur l’avenir du journal sur papier.

Au-delà de l’aspect festif, ce cahier spécial nous permet de considérer avec un peu de recul des évènements qui ont frappé les esprits au moment où ils se sont produits, de nous remémorer les étapes franchies dans divers domaines et de remarquer que des choses qui nous semblent si naturelles aujourd’hui ne datent, en fait, que de quelques années.

Les médias ont considérablement évolué au cours de ces dix dernières années, notamment avec l’arrivée d’Internet qui a particulièrement affecté le courrier postal, par exemple. En effet, l’e-mail grignote toujours plus de place face à la lettre manuscrite. Internet a également fait des dégâts au niveau du marché du disque et du DVD, ainsi qu’à l’information de manière générale, disponible (presque) gratuitement sur Internet, sur tous les sujets désirés. La journaliste (Anouch Seydtaghia) conclut cependant en disant que, bien qu’Internet ait bouleversé notre vie, l’ensemble de l’humanité est encore loin d’y avoir accès. Internet a aussi bouleversé la presse écrite. Les analystes des médias parlent de mort annoncée des journaux sur papier au profit d’une version en ligne. La venue des «gratuits» a, elle aussi, mis à mal la presse. Toutefois, tous ne partagent pas cet avis pessimiste.

La télé-réalité, phénomène qui a bouleversé le paysage télévisuel, a fait son apparition sur les écrans francophones en 2001 avec «Loft Story», notamment. Le journaliste Nicolas Dufour parle d’une «nouvelle étape dans la «poubélisation» de la télévision». Pour lui, «cette télé du réel n’a jamais été réelle» et «ne laisse pas grand-chose en héritage».

Autre phénomène: cette manie d’exposer la sphère privée des personnalités publiques (Sarkozy-Bruni, pour prendre l’exemple actuel type). La frontière entre domaine public et privé semble s’être effondrée et l’intimité du personnage public se place au même plan, surpasse même parfois son activité publique. Le journaliste, Stéphane Bonvin, s’interroge sur la source du phénomène et place en tête la prise de photo facilitée par les nouvelles technologies (photo numérique et téléphones portables) «qui ont accéléré la diffusion d’images jusqu’alors contrôlées» et l’obligation pour les politiciens de se montrer en «Madame ou Monsieur Tout Le Monde».

Concernant les grands mouvements qui ont marqué cette décennie au niveau mondial, la rétrospective évoque l’utilisation de l’Euro comme monnaie commune, circulant depuis le 1er janvier 2002. L’éveil de la Chine est également mentionné, ainsi que le régime de Poutine, la guerre en Irak, la chute de Saddam Hussein ou encore la montée des mouvements religieux intégristes «voulant remettre Dieu au cœur des Sociétés », selon l’analyse de Patricia Briel. Côté suisse, ce qui a notamment retenu l’attention est le «grounding» de Swissair, le manque de traces laissées par Expo 02 et le mandat de Christophe Blocher. Bien d’autres aspects sont encore mentionnés, analysés et intéressants à consulter.

Ce rituel des bilans et rétrospectives, qui nous gave généralement en début et fin d’année, apparaît ici comme un moyen d’avoir une vue d’ensemble, avec un recul plus important, sur cette dernière décennie écoulée. Ce cahier spécial ne manque pas de susciter intérêt et réflexion  sur des évènements parfois trop vite relégués dans les oubliettes de notre mémoire.
S.B.
1Source : Hors-série, Le Temps, édition du 18 mars 2008

Evénements

Un regard sur le Salon de l’(e)automobile

EXPOSITION
Avec une légère baisse du nombre de visiteurs pour sa 78ème édition, le Salon de l’automobile semble peiner à se renouveler. Et pourtant. Les constructeurs automobiles ont cette année misé sur l’écologie et l’innovation, avec, pur hasard ou habile stratagème, une stratégie de nombreux exposants misant sur le thème de l’océan pour attirer les clients. Mais avec des résultats mitigés.Petit tour d’horizonde.
de Genève Sébastien Anker

Avec un peu moins de 730.000 visiteurs pour sa 78ème édition, le Salon de l’automobile de Genève est une figure référence dans le domaine de l’automobile. Pourtant, le record d’entrées n’a pas été battu cette année, en comparaison des près de 750.000 entrées lors de son 100ème anniversaire en 2005. Fait étrange, étant donné les débauches d’innovations auxquelles se sont livrés les constructeurs automobiles cette année. Une attention plus large de la part du public aurait été attendue, notamment par la multiplication de modèles « verts » et de modèles plus ou moins… extravagants.

« Vague verte »
En effet, certains modèles ont cette année misé sur une écologie sans failles afin de se démarquer. Faisant pâle figure à côté des luxurieux modèles des industries Porsche, Ferrari et Jaguar, la « Th!nk City » des entreprises Ford n’en est pour autant pas à dédaigner. Présentée sous une forme peu habituelle lors du l’exposition, enveloppée dans une bulle hermétique géante symbolisant l’absence d’émissions du véhicule, cette voiture représente le futur de la voiture écologique. Totalement électrique, rechargeable sur une prise 16 Volts, cette voiture aux airs de Smart peut atteindre une autonomie de 180 kilomètres sans émettre la moindre pollution. Interrogé sur le phénomène de la « vague verte » submergeant l’exposition cette année, le directeur de l’exposition Rolf Studer a expliqué le phénomène par « les nombreuses discussions tournant autour des émissions de CO2. Aujourd’hui, tous les constructeur de renom ont au moins une voiture à propulsion alternative dans leur gamme. », dans une interview de la TSR.

Contre vents et marées
Si le cette édition a été placée sous le signe de l’écologie, elle l’a également été sous le signe de l’océan. La Mazda « Taiki » possède, elle, un extérieur aérodynamique lui conférant, selon la perspective, une apparence de raie marine ou de baleine argentée, et passe difficilement inaperçue. Toutefois, l’aspect futuriste semble plutôt céder au désir d’améliorer l’image de Mazda qu’à un réel désir d’innover. En effet, les questionnaires aimablement délivrés par les employés de Mazda portaient plus sur l’image de la marque que sur les caractéristiques de leur nouveau modèle.
Plus loin, le stand de Nissan a attiré les curieux, non pas uniquement grâce à ses charmantes hôtesses, mais surtout par la nouvelle Pivo 2, une voiture aux allures de tortue folle, capable de faire pivoter son habitacle à 360 %, la rendant capable de se parquer latéralement, ou de repartir en sens inverse instantanément. Là également, coup de pub ou nouvelle approche du concept de voiture urbaine, rien n’est encore certain. Il n’empêche que les curieux étaient nombreux à admirer la présentation du véhicule.
Certaines marques telles que Rinspeed sont parvenues à combiner écologie avec originalité. La « sQuba », dernier modèle présenté lors du Salon de l’Auto, est elle – encore – inspirée du monde aquatique. Cette voiture permet aux passagers, entre autres, de naviguer tout comme un poisson sous dix mètres d’eau… et assure une vitesse de pointe sur terre ferme de 120 Km/h grâce à son moteur électrique. Quant à l’application réelle de cette voiture… une apparition dans un prochain « James Bond » ?

Pour tous les budgets
Quant à la nouvelle « Nano » du constructeur indien Tata Motors, son apparence extérieure n’est guère attractive. Sa nouveauté, en effet, vient de son coût, qui est un des plus bas du marché, avec seulement 2. 800 Francs à débourser pour un modèle neuf. Elle a été présentée dès ses débuts comme « la voiture du peuple », avec l’objectif avoué d’être accessible même aux familles les plus modestes. Quant à l’opinion de Budhaditya Banerjee, étudiant indien récemment installé à Neuchâtel, elle est sans équivoque : « La « Nano » ne fera qu’augmenter les problèmes de circulation en Inde, dans le cas où chaque famille se procure un exemplaire. C’est un projet totalement inutile ». Il se pourrait également que sa commercialisation soit interdite Europe, étant donné les normes de sécurité minimales du modèle.

« Pas si vert que ça »
Malgré l’omniprésence des labels « verts » venant des constructeurs automobiles, des critiques venant de Greenpeace ont fusé. Dans leur communiqué de presse, Cyrill Studer, responsable de la campagne Transports de Greenpeace Suisse, critique la volonté de promouvoir les véhicules par leur aspect non polluant : « Ce n’est pas seulement la pub qui va résoudre le problème des changements climatiques et qui nous préservera de leurs conséquences dramatiques ». En effet, selon une étude de Greenpeace, si certains modèles sont réellement efficaces pour la protection du climat, d’autres font nettement augmenter la moyenne de CO2 émise par les modèles exposés lors du Salon. Notamment les quatre roues motrices, toujours très présentes.
Le monde marin, avec ses connotations de pureté et de propreté, a été abondamment utilisé par certains grands constructeurs lors de leurs opérations marketing. D’autres ont misé sur une dévaluation des prix. Certains enfin ont eu une véritable conscience écologique. Il semblerait que cette édition du Salon de l’auto soit représentative des prochains courants en matière de construction automobile.
S.A.