Eclairage

Un moustique vaccinateur : entre mythe et réalité

Mars 2010. Des scientifiques de l’Université médicale de Jichi (région de Tokyo) ont modifié  génétiquement le moustique responsable de la leishmaniose, avec comme conséquence qu’une souris piquée par ce moustique développe un anticorps qui l’immunise contre la maladie.

Surprenant. Qui aurait cru entendre cela un jour : un moustique vaccinateur. « Théoriquement, il est possible de modifier génétiquement un moustique pour qu’il produise une protéine antigénique de leishmanie », me confirme le Mr. Brossard, professeur et directeur de recherche du laboratoire d’immunologie parasitaire à l’Université de Neuchâtel. Concrètement : le moustique, à travers sa salive au moment de la piqûre, transmet cette protéine antigénique qui provoque la production de l’anticorps chez la souris. Pour rappel, la leishmaniose est une maladie engendrant de fortes fièvres potentiellement graves et mortelles. Il se trouve que le moustique vecteur de cette maladie est aussi vecteur du paludisme. Dès lors, on comprend un des enjeux de cette expérience, qui serait de l’étendre au paludisme.

De la théorie à la pratique
Les problèmes liés aux aspects pratiques de la mise en place de ce nouveau genre de vaccination n’ont pas été livrés au large public. C’est pourquoi, je me suis tournée vers le professeur Brossard, qui a soulevé certains de ces aspects. «Personnellement, je suis assez sceptique avec une telle approche, bien que scientifiquement intéressante », me confie le professeur. « Outre les problèmes éthiques, je vois plusieurs grosses inconnues :

1. Quel(s) gène(s) (protéines) parasitaires faut-il cibler? La production d’anticorps d’une seule spécificité est sans doute insuffisante pour produire une protection.

2. La dose à injecter (nombre de piqûres) pour produire une protection serait non contrôlée, comment la différencier avec l’établissement d’une prémunition?

3. Les vecteurs hématophages injectent avec leur salive des facteurs protéiniques anti-inflammatoires et immunomodulateurs, quels seraient leurs effets sur la protection? Dans les vaccinations habituelles, on mélange à l’antigène un adjuvant qui augmente au contraire la réponse immunitaire », me répond-t-il.
En résumé : notre moustique qui a vacciné avec succès une souris, n’est pas encore prêt à franchir les fenêtres des labos.

Deux problèmes éthiques majeurs
1. Peut-on lâcher dans la nature des moustiques transgéniques dont on n‘aurait plus le contrôle ? 2. Peut-on immuniser des populations sans leur accord ? Quand bien même ce moustique transgénique serait une solution formidable d’un point de vue vaccination (gratuit et facile d’application), il faut s’imaginer aussi une révolution au niveau de l’éthique médicale. A l’heure actuelle ni l’OMS ni les différents pays concernés par le problème ne seraient d’accord pour autoriser ce genre de pratique. 
Enfin, le moustique serait dérangeant pour les firmes pharmaceutiques, qui n’y gagneraient rien dans l’histoire. Laisseraient-elles passer une telle révolution scientifique ? 
K.A

Actualité

Un avion solaire s’envole vers un ciel plus vert

Le 7 avril à 10h30, un spectacle peu commun a conquis le ciel de Payerne devant les yeux ébahis des habitants du canton de Vaud et les médias venus de toute l’Europe. Propulsé uniquement par l’énergie du soleil, un gigantesque avion de 63 mètres d’envergure a quitté les pistes pour un vol de 87 minutes atteignant les 1.200 mètres d’altitude. Un soupir de satisfaction pour l’équipe de Bertrand Picard qui ambitionne un tour du monde à son bord pour 2012.

Qui aurait pu prédire que le soleil nous ferait voler ? Les 25 spécialistes œuvrant depuis 7 ans sur le projet Solar impulse voient enfin le fruit de leur travail prendre son envol. Un avion écologique capable de se déplacer à la seule force des rayons solaires, c’est du jamais vu ! Poussé par ses quatre moteurs électriques d’une puissance de 10 chevaux chacun, l’engin s’est élevé lentement dans les airs, sous les commandes de l’allemand Markus Scherdel. Son énergie lui provient des batteries électriques rechargeables en vol grâce aux 11.628 cellules photovoltaïques captant les rayons solaires.

Un défi de maître
Le président de cette aventure n’est autre que Bertrand Piccard, « le savanturier » suisse qui a le premier réalisé un tour du monde en ballon. Satisfait de cet exploit qui s’est déroulé sans accident, il avoue cependant que le chemin est encore long avant de pouvoir réaliser son projet de tour du monde. Effectivement, ce n’est pas encore gagner… Encore faut-il que l’engin parvienne à voler de nuit. Le prochain défi à relever sera de voler en l’absence de rayons solaires grâce à la restitution de l’énergie de la journée accumulée dans les batteries, et ça, jusqu’au levé de soleil suivant.

Un géant inoffensif
Avec ses 63 mètres d’envergure, le Solar impulse mesure plus qu’un Airbus A 340-500 ! On le devine, cette taille vise à offrir une surface maximale aux cellules solaires. Géant, oui, mais ultra léger ! Alors que l’Airbus pèse 174 tonnes, l’avion solaire ne pèse pas plus qu’une voiture (1,6). Comment? Il est constitué de fibre de Carbonne : un matériau à la fois léger et  résistant. Poussé par les forces de la nature, le gentil monstre n’émet pas la moindre pollution. Une révolution quand on constate que les trajets en avion représentent 3% de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre.

Mission accomplie
Ce premier vol qui visait à vérifier la contrôlabilité de l’appareil a répondu à toute attente. L’engin, malgré son poids plume et son éminente taille, s’est laissé conduire comme l’avait prévu le simulateur de vol. Les espoirs se sont transformés en certitude, le projet s’est révélé être une réussite. De quoi nourrir l’espoir de vivre dans un monde plus sain en misant sur l’usage des ressources naturelles. Après ce premier succès, le Solar impulse s’est offert un second vol au dessus de la Broye et du lac de Neuchâtel, le 22 avril, pour effectuer une batterie de test supplémentaires.
Laura J.