Face à Face – Un jeu de regards sur les Alpes


La 30ème édition du Salon du Livre de Genève s’est tenue du 27 Avril au 1er Mai 2016, évènement incontournable des amoureux du livre sous toutes ses formes. Larticle.ch y a rencontré Pierre Abramowski et Maurice Schobinger sur la Place du Voyage afin d’échanger autour de leur second ouvrage : Face à Face.


Maurice Schobinger est photographe, Pierre Abramowski est guide de montage. Amis, ils sillonnent tous deux les Alpes et leurs plus beaux sommets depuis une vingtaine d’années. Après une première collaboration, qui a abouti à la publication de l’ouvrage « Altitude 4000 » en 2000, les deux compères ont à nouveau mis leur expertise en commun entre 2013 et 2015. Ils ont photographié les faces des Alpes sous un angle novateur : prises de vue par hélicoptère, afin de témoigner de leur tenue la plus pure. Lumière voilée, sans artifices de cartes postales ni volonté d’idéalisation, le livre “Face à Face” est une plongée dans le monde brut et fascinant de la haute montagne.

Les visiteurs hétéroclites du Salon du Livre se sont déplacés en masse en ce Dimanche 1er Mai, assemblée tout aussi variée lors de la conférence de présentation du livre au grand public. L’ouvrage trilingue (français-allemand-anglais) est paru le 5 Novembre 2015 en librairie, et comporte 100 photographies en couleur et en noir et blanc.
C’est presque timidement, et avec une certaine intimité que Maurice Schobinger et Pierre Abramowski livrent leur parti pris, ce Face à Face à la fois intimidant, mais tout aussi intriguant, avec les Alpes. Il y a un double regard, celui du photographe, esthète appliqué, à la recherche du cadrage parfait, et puis il y a celui de l’alpiniste, athlète des sommets à la conquête des plus belles arrêtes, dont la technique dépasse parfois l’esthétisme. L’alpiniste, face à la montage, mais également face à lui-même. Des regards imbriqués qui se succèdent alors que les images défilent en arrière-plan, sur fond de brume et d’humilité.
Bien sûr, il y a eu une sélection des sommets présentés dans l’ouvrage, elle se fait par leur nom, leur esthétique… Et leur difficulté. Un travail de longue haleine, quelle face délaisse-t-on à la place d’une autre ?

Deux à trois années de travail pour collecter les photos, et un choix, celui de photographier la montagne et non sa lumière spécifique. Ce qui surprend en lançant un premier regard aux images c’est ce choix évident, pas de sur-jeu, pas de ciel limpide ni de lumière extravagante. De la pureté par contre, et de l’étonnement.
C’est ce dénuement qu’ont justement cherché les deux amis, le livre présente des informations techniques concernant chaque sommet, mais très peu de textes. Au lecteur de s’en faire sa propre interprétation. Parti pris encore une fois, sous lequel la subtilité d’une touche critique s’est glissée : celle du tourisme de masse, ce même tourisme qui dénature la montagne, la rend terrain de jeux, lui confère des aspects consuméristes et prône la performance, les chiffres, la gagne. Les conséquences de l’attrait touristique de l’arc alpin pour Maurice Schobinger ? “Beaucoup de gens ne sont pas à leur place en montagne, ne prennent pas en compte les risques, ne profitent même plus de la beauté qui leur est offerte”. Et à Pierre Abramowski de confirmer “Pour moi, la montagne ce n’est pas un sport, c’est un mode de vie. Je l’ai redécouverte en prenant part à ce projet photographique, et surtout j’ai vu combien de personnes la pratiquaient sans connaissances ni états d’âme”.

Une autre thématique abordée est celle du réchauffement climatique, et les mutations qu’il entraîne dans les Alpes. Ces “Seigneurs alpins”, souvent à plus de 4000 mètres d’altitude, ont pourtant conservé leur vigueur intemporelle, et ce malgré des glaciers moins imposants et des fontes de neige qui font chaque année des dégâts impressionnants. “Dans vingt ou trente années on pourra donner un témoignage de 2015, maintenant c’est encore trop tôt, mais ce qui est sûr c’est que la nature elle s’en remettra, le problème c’est pour nous”, souligne Maurice Schobinger.

Et s’il ne fallait choisir qu’une seule Face ?
Pour Maurice c’est la Face Nord du Chardonney, l’une de ses dernières ascensions. Et pour Pierre c’est la Face Nord de l’Aiguille Verte, effectuée pour la première fois à 16 ans, ainsi que la Face Nord du Cervin et de l’Eiger, parois mythiques qui ont fait et font encore rêver les alpinistes les plus chevronnés.
Face à face majestueux, face à face humain, coups d’oeil vertigineux et imaginaire stimulé, c’est ce que nous propose ce livre aux 100 Faces.

NoAn.

Deux photos tirées du livre :

– La mythique face Nord du Cervin
Cervin

– La moins connue face Nord de l’Obergabelhorn
Obergabelhorn

Pour plus d’informations : http://www.leseditionsnoirsurblanc.fr/face-a-face-maurice-schobinger-9782882504005

 

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