« Le temps, c’est de l’argent ». Qui n’a jamais entendu ce dicton populaire, miroir de notre société stressée qui nous pousse à toujours faire plus, plus vite. Prendre son temps est devenu chose rare, et comme chacun le sait, la rareté coûte chère.
Time Out reprend donc cela à sa manière, dans un monde futur, fortement “ghettoïsé”, où la seule monnaie valable est le temps. Le concept : à partir de 25 ans, l’humain, génétiquement modifié, cesse de vieillir, mais il doit gagner du temps s’il ne veut pas mourir. Cela donne des situations cocasses où la mère, la fille et la grand-mère se retrouvent côte-à-côte, et où il est impossible de distinguer qui est qui. Cette nouvelle forme de monnaie peut donc créer des personnes immortelles, riches, qui n’ont jamais besoin de se presser, et des pauvres, qui vivent au jour le jour et s’écroulent dans la rue car sont arrivés au bout de leur temps.
Will Salas (Justin Timberlake) fait partie de ces pauvres qui enchaînent les heures de travail pour suivre ou plutôt survivre à l’augmentation des coûts de la vie. Mais une rencontre va changer le cours de sa vie. Un immortel de Greenwich (la partie des riches), venu se donner des sueurs froides dans le ghetto, va lui donner tout son temps après que Will lui a sauvé la vie. Accusé à tort de meurtre, Will va s’enfuir dans les quartiers riches ou il sera traqué par les gardiens du temps, dont le redoutable Raymond Leon (Cillian Murphy), intraitable et incorruptible. Will prend en otage la fille d’un des plus riche immortels de la ville, qui devient son alliée et s’en suit une véritable course contre la montre à travers les ghettos.
C’est là que le film devient intéressant et qu’il aurait pu être brillant. Ce Will, aidé de sa compagne n’est pas seulement droit et respectable, mais il veut aider le monde, les pauvres à s’en sortir. Une sorte de Robin des Bois moderne, qui vole au riche pour donner au pauvre. Cependant, et c’est là tout le problème, le réalisateur (Andrew Niccol, génial créateur du Truman Show, Bienvenue à Gattaca ou encore de Lord of War) se contente de quelques bagarres entre les caïds du ghetto ou le pugnace gardien du temps, de braquer quelques banques au père de la douce et les redistribuer à ses comparses de misère, le tout saupoudré de la morale manichéenne d’Hollywood.
Ce film, qui aurait pu être la critique aiguisée du capitalisme moderne, avec ces nanti qui vivent sur le dos des pauvres travailleurs ne va pas plus loin que le vol de ces méchants riches pour redonner aux gentils nécessiteux. « Pour que quelques-uns vivent, il faut que beaucoup meurent », cette phrase choquante aurait pu ouvrir le débat de qui a le droit de rester vivant? Il aurait également pu pousser plus loin la dénonciation de la course à l’éternelle jeunesse, avec les questions, notamment éthiques qu’elle entraîne. Qu’est-ce qu’on fait après avoir vécu mille ans? A-t-on encore des choses à voir, à vivre? A-t-on peur de faire quoi que ce soit qui nous fera prendre des risques et nous tuera? Le film se termine donc en « tout est bien qui finit bien », et les spectateurs sortent des salles obscures en se disant qu’ils ont passé un bon moment, divertissant, mais très loin des réflexions qu’un tel film aurait pu susciter.
ChaM