« L’éducation, source de nos violences ? »

 

Pour ce premier café scientifique de l’année 2012, les organisateurs du débat ont décidé de remonter « aux sources du mal » selon les termes du modérateur Vincent Costet, soit, aux sources de nos violences, en s’interrogeant sur le rôle que joue l’éducation dans le développement de celles-ci.
Notre éducation est-elle le produit d’un système judiciaire répressif ? Peut-on mettre la faute sur le système ? Où sont les limites de la violence ?

La question de la « petite fessée » aura été récurrente au long de la discussion. Estelle de Luze, avocate qui s’est intéressée au droit de correction dans le cadre de sa thèse de doctorat, situe le débat au niveau juridique et rappelle qu’il n’y a plus de droit de correction prévu pour les parents. Aujourd’hui, ce droit est reconnu par la jurisprudence : si un acte violent est commis avec reprise, il est punissable. Dans le cas d’un acte isolé, la punition du parent dépend de la plainte éventuelle de l’enfant.
Le professeur Suzette Sandoz, directrice de thèse d’Estelle de Luze, admet avec le sourire ne pas avoir été toujours « sur la même longueur d’onde » que cette dernière. Elle  évoque par la suite la « petite fessée » et est d’avis qu’elle n’est pas un mal dans les cas rares qui l’exigent.

Pour tenter de définir les limites à ne pas dépasser, René Knüsel, politologue, sociologue et directeur de l’Observatoire de la maltraitance envers les enfants, revient d’abord sur le fait que la violence est un domaine vaste. Il souligne que certaines formes de violence sont admises de façon courante dans notre société. La violence n’est pas seulement physique, bien que ce type de violence monopolise l’attention. Par exemple, la violence au sein d’une famille peut déjà être dirigée contre l’enfant même si elle n’a lieu qu’entre les conjoints.
Les limites sont toutefois complexes à établir. En effet, comment construit-on une preuve de violence ? Elever la voix, est-ce de la violence ? Traiter un enfant de « bon à rien » n’est-ce pas plus violent que de lui donner une « petite fessée » ?

Opposé à toutes formes de violence, André Kuhn, professeur de criminologie et de droit pénal à l’université de Neuchâtel, soutient que la violence n’est jamais tolérable. En effet, elle est une sanction qu’on afflige à l’autre parce qu’on veut récupérer l’autorité qu’on pense avoir perdue, qu’on afflige à l’autre pour soi-même et pas pour le bien de l’autre. A cela, René Knüsel ajoute que le recours à la violence est l’aveux de la perte de pouvoir, qu’il intervient quand les parents n’ont pas les moyens de faire faire à l’enfant ce qu’il faut, d’être des éducateurs conformes aux critères de la socitété.

Estimant que la violence dans l’éducation est propre à créer les violences de demain, le point de vue de André Kuhn est que plus l’enfant aura fait l’expérience de différents modes de résolutions des conflits, plus il aura de moyens en sa possession pour résoudre ses propres conflits. La solution serait alors d’expliquer à l’enfant, dès le plus jeune âge, ce qu’il ne faut pas faire et ce qu’il convient de faire, mais on ne devrait pas imposer ce qu’il est bon de faire ou non par une sanction.

Quels sont les effets de la violence dans l’éducation ? A ce jour, cette question n’a pas été résolue. Le lien est certes de mieux en mieux établi entre les situations vécues dans l’enfance et le comportement de l’individu au long de la vie mais il est difficile d’établir des liens systématiques de causalité et de conséquence exacts des effets de la violence. De plus, la diversité des caractères des enfants entre en ligne de compte : renfermement sur soi-même, violence ou encore addcition sont autant d’effets possibles. On est loin de parvenir à un lien de causalité effectif et fort.

La question s’est ensuite orientée vers l’appel à une aide extérieure, que ce soit pour l’éducation au sein de la famille ou pour la gestion de la violence au sein de celle-ci. Les intervenants nous font remarquer qu’en Suède, par exemple, pays où le taux de violence à l’égard des enfants est très peu élevé, le soutien aux familles est important. A cela s’ajoutent des lois qui interdisent toute forme de violence faite aux enfants bien connues de la société.
Sur le même modèle, si une loi prohibant toute forme de violence envers les enfants était indroduite et rendue publique en Suisse, elle pourrait être l’un des moyens de diminution des violences dans l’éducation.

Ce que tous s’accordent à penser, est que la violence ne doit jamais être un moyen éducatif.
L.dA

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