« Les amitiés du principal actionnaire de TF1 avec Nicolas Sarkozy que je respecte, ne me regardent pas. Elles ne jouent en rien sur l’information », a déclaré Robert Namias, directeur de l’information de la chaîne du groupe Bouygues sur RMC (le 19.02.07).
On est tout de même en droit de se poser quelques interrogations sur la liberté journalistique des médias tels que TF1. Le 5 février sur TF1, lors de l’émission « J’ai une question à vous poser », la prestation de Sarkozy a choqué. En effet, il peut sembler quelque peu sournois que la production du programme ait été assurée par Dominique Ambiel, ancien conseiller pour la communication de Jean-Pierre Raffarin à Matignon, devenu allier de Sarkozy lors de la campagne référendaire sur la constitution européenne. Qui plus est, le propriétaire de la chaîne TF1, Martin Bouygues, n’est autre qu’un ami de trente ans de Nicolas Sarkozy.
Il est légitime de s’interroger sur l’impartialité des médias. En France, il y a tout de même une institution qui veille au pluralisme. Il s’agit du CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel). Cependant, si l’on regarde de plus prêt, on s’aperçoit que son nouveau président Michel Boyon, est, comme M. Ambiel, un ancien du cabinet Raffarin. Ces liens ne doivent pourtant pas aboutir sur des conclusions hâtives, mais on doit s’interroger sur l’indépendance revendiquée des journalistes comme par les membres du CSA.
Sarkozy, Royal, et qui d’autre ?
Ceci n’est pas un secret, les médias français font de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal les uniques candidats aux élections présidentielles. Tous deux, ils bénéficient d’une personnification inouïe des enjeux. Par exemple, lors de la venue de Nicolas Sarkozy à l’émission « Inter-Active » de Nicolas Demorand sur France Inter, seulement trois auditeurs avaient pu s’exprimer. Alors qu’à la venue de José Bové, invité a priori moins éminent, il y avait énormément de questions. L’émission fut expéditive. Cet exemple montre bien que Sarkozy est bel et bien favorisé en temps de parole. A croire que José Bové avait moins de choses intéressantes à nous dire. Le CSA l’a reconnu et a déploré le 4 janvier 2007 « la bipolarisation excessive au profit de deux candidats » et « l’insuffisance du temps de parole » accordée aux autres, sur France Télévisions, TF1, M6 et Canal+.
En ce qui concerne la radio de service public, elle a divisé les candidats en quatre catégories (source : www.acrimed.org):
– la première qui disposera de 40 % du temps d’antenne regroupe l’UMP et le PS
– la seconde qui disposera de 30 %, l’UDF et le FN
– la troisième qui disposera de 25 % regroupera ceux appelés « petits candidats », PCF, LCR et Nicolas Hulot
– les autres candidats se répartiront les 5 % restants.
Le contrôle des médias est-il un gage de réussite ? Pas forcément
On se rappelle de l’échec politique de Silvio Berlusconi qui pourtant contrôlait de nombreux médias en Italie. Ceci illustre bien que contrôler n’est pas s’imposer. En d’autres termes plus épicés, on pourrait dire que trop de propagande tue la propagande. Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal ne sont pas à l’abri d’un ras-le-bol populaire.
Selon Raphaëlle Bacqué, chef du service politique au journal Le Monde, « il faut tous les jours frapper les esprits afin d’être à nouveau remarqué. (…) On risque vite à ce jeu-là de susciter une forme d’anxiété dans l’opinion, forcée de suivre le rythme chaque jour plus rapide du maelström dans lequel chacun, à la fin, se trouve englouti ».
Certes il y a un risque, mais la population française façonnée dans le moule Royal-Sarkozy ne verra pas, pour une majorité d’entre elle, d’autres alternatives que ces deux candidats sur médiatisés. Si ce n’est Jean-Marie Le Pen, lui aussi souvent présent sur les plateaux mais bénéficiant d’un temps accordé plus court.
La question est moins de savoir qui va gagner ces présidentielles que de savoir si la démocratie et la république sont en danger. Vouloir maîtriser l’information n’est-il pas un terrain glissant vers le totalitarisme ? Bien sûr, la comparaison est un peu forte, mais le procédé de contrôle des médias, même sporadiquement lors d’élections, me rappelle un certain Adolf Hitler dont la propagande se résumait surtout en des messages courts et répétitifs. Comparaison brutale et anachronique me direz-vous, mais propagande politique il y a bien.
M. M.