Ces dernières années, une nouvelle approche de la cuisine tend à faire de l’art culinaire une science exacte. Fini le temps des indications approximatives sur la manière de préparer à manger : place à la gastronomie moléculaire.
Combien de temps faut-il pour cuire un œuf ? A quelle température faut-il griller un steak ? C’est sur ces questions aux réponses souvent approximatives que la science se penche désormais. En effet, depuis quelques années, la gastronomie moléculaire, en référence à la biologie moléculaire, étudie les réactions physico-chimiques de l’art culinaire. Bien qu’existant depuis longtemps, cette nouvelle approche de la cuisine est véritablement née de la rencontre, au milieu des années 80, de deux physiciens, Nicholas Kuti et Hervé This. L’objectif de leurs recherches est de vérifier les dictons culinaires au moyen d’expériences scientifiques et de perfectionner les actuelles pratiques par l’introduction d’outils et de méthodes rigoureuses. Les bonnes vieilles recettes se transforment donc en équations précises, mêlant règles mathématiques et lois physiques. Ainsi, la préparation d’un soufflé au fromage passe par l’application de la loi des gaz parfaits, afin d’obtenir un gonflement optimal !
Toutes ces technologies au service de la gastronomie moléculaire ont pour but de donner une meilleure maîtrise du goût et de faciliter la confection des plats. Mais ont-elles véritablement leur place dans une cuisine ? Difficile en effet d’imaginer un scientifique dans son laboratoire préparer un bon filet de bœuf avec sa calculette et ses éprouvettes. Pas très appétissant. L’art culinaire n’a rien d’une science exacte. Et si l’on peut reconnaître certains mérites à la gastronomie moléculaire – la découverte de nouvelles saveurs par exemple –, on peut toutefois craindre, à long terme, une standardisation de la préparation de la nourriture : une formule mathématique étant plus précise qu’une recette de cuisine, les soufflés au fromage auront tous le même goût !
Evidemment, cela n’arrivera (probablement) jamais. La science peut certes expliquer pourquoi le bacon rétrécit lorsqu’on le grille ou pourquoi le lait déborde si on le laisse trop longtemps sur le feu – après tout ce sont des réactions chimiques ! –, mais difficile de croire qu’elle peut déterminer ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Toutefois, de nombreux chefs les ayant adoptées, les techniques de la gastronomie moléculaire ne semblent pas être une menace pour les multiples facettes de l’art culinaire.