Eclairage

Violence et handicap

La violence peut prendre de multiples formes. On parle de violence morale (ou mobbing), de violence physique ou encore de violence contre soi. Elle est, sous toutes ses formes, omniprésente dans les médias. Cet article va pourtant s’intéresser à un sujet rarement traité par les médias. La violence produite ou subie par les personnes handicapées reste effectivement tabou.
Pourquoi cette violence touchant les personnes ayant des incapacités reste-elle confinée aux milieux spécialisés ? Comment sensibiliser le public à ce problème ? Quelles sont les solutions proposées ?

Les risques pour les enfants handicapés à endurer des sévices physiques ou moraux sont sensiblement plus forts que pour les personnes n’ayant aucunes incapacités. Les recherches démontrent également que le taux annuel de violence est 1,7 fois plus élevé à l’égard des enfants handicapés. Ces affirmations mettent mal à l’aise. Non pas uniquement parce que c’est injuste, mais aussi car les personnes souffrant d’un handicap sont censées être égales de droit dans notre société. Or, ces déclarations nous prouvent le contraire. N’en est-t-il pas de même du fait que le sujet est très peu exposé dans les médias ? Il reste que, dans les centres spécialisés, on se rend compte que le problème s’avère bien réel. On sensibilise les jeunes handicapés à ces actions violentes. Il ne reste qu’à espérer que les milieux spécialisés feront campagne pour sensibiliser le public à ces abus. Remarquons encore qu’il n’existe pas, en Suisse, de statistiques concernant des actes de violences spécifiques aux personnes ayant un handicap. Les institutions nationales continuent donc de négliger ces graves agissements.

La violence produite par des personnes handicapées
Ce qui encore plus choquant (et tabou) que les actes de violences subits par les personnes ayant des incapacités, ce sont les violences commises par ces dernières. Les professionnels de centres qui prennent en charge des adolescents souffrants de handicap mental lourd doivent fréquemment faire face à des crises violentes. Lorsque des adolescents sont énervés, ils dirigent leur frustration le plus souvent contre eux-mêmes. Du fait qu’ils n’arrivent pas à exprimer et à maîtriser leurs émotions, ils se font du mal pour évacuer leurs traumatismes. Les professionnels qui s’occupent de ces jeunes handicapés doivent savoir les calmer et communiquer. Ces capacités doivent être particulièrement maîtrisées dans certains cas graves, comme les agressions sexuelles. Récemment, un homme de 28 ans souffrant d’un handicap mental a agressé une jeune fille dans un parc. Cet acte révèle un grand malaise. Le fait est que la sexualité frustrée de personnes ayant un handicap mental lourd peut provoquer de tels gestes. Les professionnels des centres spécialisés sont partagés quant aux solutions les mieux adaptées. Certains proposeraient aux personnes limitées intellectuellement des agences de rencontres avec des prostituées (ce qui existe déjà en Belgique). Cette possibilité pose évidemment un problème d’éthique. Comment savoir si les handicapés mentaux ne cherchent pas de l’affection et de la tendresse plus que le pur acte sexuel ? Il faudrait travailler au cas par cas, suggèrent les spécialistes. Car ces rapports physiques pourraient également les traumatiser. C’est pourquoi d’autres professionnels s’opposent strictement à cette voie. Ils proposeraient plutôt de sensibiliser les personnes ayant un handicap mental lourd à leur sexualité. Des cours d’éducation sexuelle seraient mis à disposition.

Le débat doit être lancé. Les centres spécialisés et le milieu médical doivent sensibiliser les populations à ces actes de violence qui font partie de la vie des personnes handicapées. Il est également nécessaire que les institutions nationales s’interrogent à ce sujet. On prétend, et on assure que les personnes handicapées sont égales en droit. Pourtant, différents points de cet article démontrent qu’une certaine partie de la population et diverses institutions n’agissent pas dans ce sens. Les spécialistes se sont mis d’accord sur une solution concernant la violence chez les personnes handicapées : le dialogue.
M.K.

Analyse

La violence au travers des médias

De nos jours, la violence est le thème par excellence, le plus médiatisé, le plus exploité, et parfois le plus banalisé que ce soit au cinéma, à la télévision ou dans les journaux.
Notre société est en passe de devenir une extraordinaire société du spectacle. Jour et nuit les médias nous bombardent d’images horribles et de scènes terrifiantes illustrant la violence dans ses aspects les plus abjects et les plus révoltants.
Au temps des jeux mortels du cirque romain, la violence a atteint un niveau effroyable: en 380 avant J.-C., saint Augustin se désolait que les combats de gladiateurs éveillent chez ses concitoyens “ fascination et ivresse du sang versé “.
La violence a toujours joué un rôle dans les divertissements de l’humanité. Mais de plus en plus de voix s’élèvent pour dire que, depuis quelques années on assiste à une transformation importante et même à une recrudescence de la violence dans les médias.
Nous vivons dans un monde paradoxal. D’un côté, la société nous dit que le développement des moyens de communication a permis de relier toutes les parties de la planète pour former un « village global » ; et de l’autre, la thématique internationale occupe de moins en moins  d’espace dans les médias, dissimulée par l’information locale, par les titres à sensation, le “people“ et par une forme d’actualité tournant autour du thème de la violence.
En sachant que certains facteurs économiques favorisent la prolifération de contenus violents, nous pouvons nous demander si cette forte présence de la violence dans les médias reflète tout simplement un choix de traiter du sensationnel ou de l’insolite. Un choix répondant à des stratégies commerciales afin d’attirer lecteurs, téléspectateurs…, friands d’événements stupéfiants et bouleversants, ou si cette omniprésence de la violence est réelle et que nos sociétés tendent vers une augmentation inquiétante d’actes cruels et violents.
Malgré tout, le rôle du journaliste est d’informer de l’actualité mais aussi de rendre compte des faits sociaux qui nous entourent et de leurs évolutions.
Son but est de nous renseigner, de nous permettre de prendre conscience de ce monde qui est le nôtre et du rôle que nous, individus, nous jouons dans ce système complexe que nous appelons “ société “.
Le média s’attache à respecter son statut d’intermédiaire entre les réalités sociales, culturelles, économiques qu’il observe, et les individus.
Par conséquent il est de son devoir, en tant que représentant de l’information, de parler du climat violent et des actes cruels qui se passent chaque jour dans le monde. De cette manière, l’être humain peut mieux comprendre nos sociétés, il peut s’interroger sur des différences culturelles, sociales, traditionnelles et les remettre en question, relativiser sa place et la place de l’autre dans le monde.

La question de la violence dans les médias demeure entière. De plus en plus, le débat se concentre sur la “ culture de la violence “ et la normalisation de l’agressivité et le manque d’empathie dans nos sociétés.
Cette omniprésence de la violence dans les médias entraîne un certain danger : celui de susciter une atmosphère de peur, d’angoisse et d’entraîner une psychose dans la population. Une population qui se sent tout d’abord impuissante face à cette “vague de violence croissante“ qui l’entoure mais aussi à la merci d’un monde qu’on lui présente comme violent et barbare.
Zoé Decker