Les J.-O. une approche sociologique.
Alors que d’aucuns se battent pour savoir si le sport peut ou non être politisé, comme il l’est actuellement avec le problème Tibétain, revenons sur la construction des Jeux-Olympiques, un fait éminemment politique !
En y regardant de plus près, le sport est une invention anglaise du milieu du 19ème siècle fondé sur les valeurs industrielles. En France, le sport, selon Pierre de Coubertin a un rôle important à jouer dans la formation du nouvel homme issu de la société industrielle. Il faut le perfectionner à partir d’un véritable projet basé sur la valeur de l’effort, de la concurrence et du dépassement de soi. Pour lui, le sport fait partie d’un véritable projet éducatif. Instauré par les élites, pour les élites, le sport contribue à reproduire les inégalités sociales. Dans le sport règne les principes de hiérarchies, de classements. Malgré la prétention universaliste et humaniste de l’illustre baron, le sport c’est construit sur un strict contrôle de son accès.
En effet, l’activité sportive était destinée aux hautes classes sociales, aux hommes pourvus d’une éthique et d’une qualité morale inaccessible aux ouvriers. Le sportif devait être un amateur et ne pas corrompre l’idéal sportif par l’appât de l’argent, ce que faisaient les professionnels des classes populaires pour gagner leur vie. De plus, les femmes en étaient exclues, ainsi que les races considérées comme inférieures !
Revenons plus précisément sur les Jeux-Olympiques. La Charte Olympique de 1894 comporte 5 dimensions.
– La dimension humaniste : « L’olympisme combine en un ensemble équilibré les qualités du corps, de la volonté et de l’esprit, caractérisant ce que devrait être l’homme nouveau. » (Article 2)
– La dimension pacifiste : « Le but de l’olympisme est de mettre partout le sport au service du développement harmonieux de l’homme, en vue d’encourager l’établissement d’une société pacifique, soucieuse de préserver la vie humaine » (Article 3)
– La dimension éducative : « En éduquant la jeunesse par le sport pratiqué sans discrimination d’aucune sorte et dans l’esprit olympique qui exige la compréhension mutuelle, l’esprit d’amitié, la solidarité et le fair-play. » (Article 6)
– La dimension œcuménique : « L’activité du mouvement olympique, symbolisé par cinq anneaux entrelacés, est universelle et permanente. Elle se déploie sur les cinq continents. » (Article 7)
– La dimension juridique et philosophique : « La pratique du sport est un droit de l’homme. Tout individu doit avoir la possibilité de pratiquer le sport selon ses besoins » (Article 8)
Qu’en est-il réellement ? Nous l’avons déjà vu, tout comme le sport, l’olympisme possède une grande force d’exclusion, en particulier des femmes et au-delà de son message de paix, il est avant tout une confrontation des nationalismes.
Il suffit pour s’en convaincre de voir les épreuves pratiquées lors des Jeux-Olympiques. Dans une publication de 1986, Pierre Parlebas étudie la répartition des jeux sportifs institutionnalisés lors des J.-O. de Lake Placid et Moscou en 1980. Il constate que parmi la grande diversité possible, les sports institutionnalisés n’en exploitaient qu’une petite partie. Voici les caractéristiques dégagée dans cet ouvrage. Le sport aux Jeux-Olympique se veut simple et compréhensible, afin d’améliorer la spectacularité des disciplines. Les milieux sont, par exemple, les plus domestiqués possibles, afin que le moins d’information issue de ce milieu ne doivent être interprétée par les athlètes. C’est une volonté d’égaliser les chances de chacun face aux aléas de la nature.
49% sont des jeux psychomoteurs, des jeux que l’on pratique seul, où il n’y a donc pas d’esprit d’amitié, ni de coopération.
26% des jeux sont des duels, c’est-à-dire, nettement plus de la moitié des jeux socio moteurs (en interaction avec d’autres athlètes, partenaires ou adversaires).
L’auteur conclut à l’individualisme et à l’antagonisme des Jeux-Olympiques.
De tout temps, l’activité sportive a été reliée à son contexte socio-culturel. Violent et militaire, il était enseigné aux jeunes spartiates, afin de leur inculquer un comportement guerrier et d’améliorer leurs capacités physiques (force, endurance, …).
A l’époque, des jeux étaient déjà organisés, dans le but de montrer la suprématie de sa cité. Il est légitime de se demander si, actuellement, les objectifs ont réellement changés ? Voyez les tableaux de classements par nations. Même si la violence des affrontements à sensiblement diminuée, il est extrêmement rare qu’un athlète meure en combat, il subsiste une forte violence symbolique. Le vainqueur jubilant sur son podium, alors que le vaincu pleure littéralement à ses pieds. Ces sportifs déifiés sont les représentants de toute une nation, portent sur eux les espoirs de tout un peuple et sont là pour faire briller la couleur de leur drapeau au son de l’hymne national !
Sébastien Goetschmann
Documents de référence :
Pierre Parlebas (1986), Éléments de sociologie du sport, Paris, Presses Universitaires de France.
Charte Olympique de 1894